Syndrome d’alcoolisation fœtale : un diagnostic bientôt possible dès la naissance ?
27 juillet 2023
Les cas modérés du syndrome d’alcoolisation fœtale sont parfois très difficiles à diagnostiquer et les signes ne sont perçus que lorsque l’enfant grandit. Mais une équipe de chercheurs de l’Inserm a montré que des anomalies rétiniennes, liées à une exposition à l’alcool, pouvait être observées dès les premiers jours de vie chez la souris.
Sera-t-il bientôt possible de diagnostiquer un syndrome d’alcoolisation fœtale chez les nouveau-nés ? C’est en tout cas ce que vient de montrer une équipe de l’Inserm, chez la souris.
Pour rappel, l’alcoolisation fœtale, lorsque la mère consomme de l’alcool durant la grossesse, entraîne une altération du développement cérébral du fœtus. « Des anomalies sont observées au niveau des neurones et des vaisseaux sanguins du cerveau », note l’Inserm dans un récent communiqué. Dans les cas les plus sévères, le diagnostic peut être posé rapidement ; malformation du crâne et du visage, handicap mental ou atteintes de différents organes sont des symptômes qui alertent les soignants.
Mais dans les cas plus modérés, le lien avec une exposition in utero à l’alcool – les signes sont le plus souvent repérés seulement à l’école primaire – est compliqué à établir. Ces enfants présentent le plus souvent « des troubles cognitifs et comportementaux qui se manifestent par des difficultés d’apprentissage, de concentration, de mémorisation ou encore par une grande agitation ».
Des anomalies dans les rétines des souriceaux exposés à l’alcool
L’équipe de l’Inserm a voulu savoir si les altérations vasculaires qui surviennent dans le cerveau lors d’une exposition à l’alcool pouvaient être visibles dans la rétine. Pour ce faire, des femelles souris en gestation ont reçu plusieurs jours de suite des doses d’alcool suffisantes pour se trouver en état d’ivresse. Les rétines des souriceaux ont été étudiées, ex vivo, entre 0 et 15 jours après leur naissance.
« Contrairement à la rétine humaine, celle des souris se développe après la naissance, de sorte que dans notre modèle, ce processus n’est pas concomitant à l’exposition à l’alcool. Mais c’est aussi souvent ce qui se passe chez l’humain : les femmes boivent de l’alcool tant qu’elles ne se savent pas enceintes et arrêtent ensuite, alors que la rétine de l’embryon n’est pas encore formée », explique Carole Brasse-Lagnel, de l’unité de recherche génomique du cancer et du cerveau à Rouen, qui a conduit le projet.
Un accompagne précoce pour réduire les troubles
Résultats ? Les rétines des bébés souris exposés à l’alcool présentaient un réseau microvasculaire « moins dense et désorganisé » et un déficit en neurones à calrétinine. « Ce déficit pourrait s’expliquer par les anomalies vasculaires car nous montrons que ces neurones migrent le long des vaisseaux. Il pourrait aussi contribuer aux troubles de la vision fréquemment retrouvés chez les enfants exposés in utero à l’alcool », estime Carole Brasse-Lagnel.
Reste à savoir si des anomalies de la rétine en lien avec les troubles de l’alcoolisation fœtale pourraient être observées in vivo, par simple fond d’œil, un examen non invasif. C’est ce que l’équipe de scientifiques de l’Inserm cherche à faire chez les bébés souris. « Nous espérons identifier une caractéristique du réseau microvasculaire observable par ce simple examen et associée à l’exposition à l’alcool in utero. Si nous y parvenons et que les résultats sont transférables chez l’Homme, il sera possible d’effectuer un dépistage précoce des enfants à risque de troubles neurodéveloppementaux afin de mettre en place un suivi précoce », souligne Carole Brasse-Lagnel. Et, via un accompagnement adapté, de réduire les manifestations de l’alcoolisation fœtale.