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Il faut distinguer le tabac à fumer et celui à chiquer ou même à priser (le « snuff » par exemple, un tabac sous forme de poudre brunâtre à « sniffer »). La catégorie émergente des tabacs chauffés (à environ 300 degrés) est très prisée en Corée et au Japon. En parallèle, la cigarette électronique (vapoteuse) se distingue par l’absence de tabac et de composés carcinogènes, bien qu’elle puisse renfermer des substances addictives, comme la nicotine. Dans le cas du tabac, la présence de la nicotine, d’agents carcinogènes et d’agents irritants peut entraîner des impacts sur les muqueuses, avec des répercussions avérées sur les tissus parodontaux, qui soutiennent les dents.
Les dégâts sur les tissus parodontaux contribuent à la parodontite. Cette maladie infectieuse se caractérise par une résorption osseuse et un “retroussement” de la gencive, d’où un déchaussement des dents. Ces conséquences sont clairement démontrées dans la littérature scientifique, favorisées par le tabac et en particulier la nicotine, cette dernière ayant un effet vasoconstricteur.
Là aussi, c’est prouvé : peu importe le mode de consommation, qu’il s’agisse de tabac fumé ou d’autres formes, celui-ci favorise le développement de lésions pré-cancéreuses, donc présentant un risque accru de cancer. De plus, la consommation d’alcool associée au tabac crée un effet synergique.
En fin de compte, la majorité des cancers de la muqueuse buccale, spécifiquement les carcinomes épidermoïdes (qui se présentent sous la forme d’ulcération muqueuse, de nodule, de plaque blanche ou rouge…), sont principalement attribuables aux multiples composés carcinogènes du tabac (aldéhydes, nitrosamines, dérivés aromatiques… dont le benzopyrène) mais aussi à leur association à l’alcool. La nicotine demeure addictive mais, rappelons-le, elle ne présente pas de caractère carcinogène. D’ailleurs, à ce jour, aucune donnée n’indique que l’utilisation de la vape favorise le cancer.
En ce qui concerne les tabacs chauffés, ceux qui sont portés à une température de 300 degrés sans combustion ni production de fumée, on retrouve les mêmes agents carcinogènes que dans le tabac fumé, voire certains supplémentaires. Bien que le risque théorique de cancer soit présent en raison de la présence de ces agents carcinogènes, aucune donnée épidémiologique n’est à ce jour disponible.
On trouve aussi des “leucoplasies orales” dues aux cigarettes, cigares ou tabac à chiquer. Ces lésions peuvent se présenter sous différentes formes, telles que des taches blanches ou des plaques épaisses. Elles sont considérées comme des lésions précancéreuses, pouvant évoluer vers un cancer buccal. Si des leucoplasies sont détectées, il est recommandé de consulter un dentiste ou un spécialiste en chirurgie orale (spécialité qui a remplacé la stomatologie, ndlr).
Par précaution, lors de chirurgies buccales, il est généralement recommandé d’observer un sevrage tabagique (cigarette et vape) temporaire afin de minimiser les risques de complications liées à la cicatrisation, surtout du fait de la nicotine. Le risque de défaut de cicatrisation ne devrait cependant jamais être une contre-indication absolue à la chirurgie orale.
En ce qui concerne la sécheresse buccale chez les vapoteurs, certains l’attribuent au taux de propylène glycol. Cependant, cela reste incertain.
Source : interview du Pr Jean-Christophe Fricain, responsable de la consultation de médecine buccale au CHU de Bordeaux
Ecrit par : Hélène Joubert - Edité par Emmanuel Ducreuzet