Trisomie 21 : l’évaluation du diagnostic prénatal, une étape essentielle

09 novembre 2016

En juillet 2016, la Fondation Jérôme Lejeune et 20 plaignants ont déposé une requête auprès du Conseil d’Etat. Ces derniers remettent en cause l’évaluation et la conservation des données liées au dépistage prénatal de la trisomie 21 proposées aux femmes enceintes. Opposés à cette démarche, plusieurs médecins, sages-femmes et spécialistes de l’échographie alertent le ministère de la Santé et le Conseil d’Etat. Les précisions du Dr Roger Bessis, gynécologue-obstétricien et président du Collège français d’échographie fœtale.

« Toutes les femmes peuvent avoir recours au dépistage prénatal. Mais aucune n’y est contrainte », explique le Dr Roger Bessis. Et en cas de risque avéré, le souhait d’aller plus loin dans l’évaluation du risque puis de mener ou non la grossesse à terme en cas de trisomie 21 appartient aux couples. De leur côté, par une clause de conscience, « les médecins et sages-femmes se doivent d’informer les femmes de l’existence de ce dépistage, mais ne sont pas dans l’obligation de le pratiquer eux-mêmes ».

Ainsi, la clarté nucale constitue le premier examen proposé à toutes les femmes dans le suivi du développement fœtal. Entre autres paramètres, le risque de trisomie 21 et de maladies cardiovasculaires sont évalués. « Si elle le souhaite, la femme sera informée de ces risques précis. Si elle ne souhaite pas en savoir plus sur de probables pathologies affectant le fœtus, alors aucune information n’est délivrée par le corps médical », précise le Dr Bessis.

Un choix menacé ?

Une liberté de choisir donc, pour les couples comme pour les professionnels de santé. Mais en juillet 2016, la Fondation Jérôme Lejeune et 20 parties (le Collectif contre l’Handiphobie, des gynécologues, des obstétriciens, des sages-femmes, des médecins généralistes et des femmes enceintes ayant fait le dépistage) ont déposé une requête auprès du Conseil d’Etat. Celle de supprimer le décret du 3 mai 2016 et l’arrêté du 11 mai 2016. Ces textes de loi encadrent « l’évaluation et le contrôle qualité des pratiques professionnelles ». Ils prévoient « la mise en œuvre d’un recueil national des données (…) recensant les femmes qui ont fait le dépistage de la trisomie 21, les résultats de leur test, du caryotype s’il a été fait (au cours de l’amniocentèse ndlr), et l’issue de grossesse ».

Fichage, de quoi parle-t-on ?

Selon la Fondation Jérôme Lejeune et l’ensemble des plaignants, ce système de vigilance relève de la discrimination. Et aboutit à la création de fichiers répertoriant toutes les futures mamans et fœtus concernés par la trisomie 21. Autre point dénoncé, un risque d’eugénisme lié à la possibilité de ne pas garder l’enfant atteint de d’une trisomie 21. Selon eux, « un recensement national de toutes les naissances d’enfants en fonction de leur patrimoine génétique, induit l’idée d’une norme hygiéniste que les personnes qui ont un génome « déviant » ne respecteraient pas ».

Des procédures incontournables

Diamétralement opposé à cette position, l’avis des spécialistes* réunis à l’occasion de la Conférence nationale d’échographie obstétricale et fœtale, a été précisé. Dans une lettre adressée au ministère de la Santé et au vice-président du Conseil d’Etat, ces derniers refusent la suppression de ces textes. « Les données recueillies et envoyées à l’Agence de la Biomédecine restent dans le strict anonymat. Seul le laboratoire dispose en toute logique des données complètes, conformément à la mission du suivi médical et personnalisé des femmes », souligne le Dr Bessis, auteur de la lettre. Mais « en aucune manière il y a constitution d’un « fichier national des fœtus et des nouveau-nés porteurs d’une trisomie 21. Seules sont collectées les données des examens pratiqués chez ces femmes ayant souhaité bénéficier de ce dépistage ». Et « comme partout en médecine, l’évaluation est une condition du maintien, souvent de l’amélioration, de la qualité des actes », poursuivent les professionnels et sociétés savantes dans cette même lettre. « Ces textes sont indispensables à notre bonne pratique et à la garantie d’information et de sécurité que les femmes sont en droit d’attendre. »

« Une majorité (85%) des femmes enceintes ont souhaité réaliser l’échographie et la prise de sang initiant le dépistage de la trisomie 21 », conclut le Dr Bessis.

* Collège national des gynécologues et obstétriciens français, Collège Français d’Echographie Fœtale, Société Française de Radiologie, Collège national des sages-femmes, Conseil National de l’Ordre des Médecins, Ordre national des sages-femmes, Fédération nationale des réseaux de santé périnatale, Fédération Nationale des Centres Pluridisciplinaires de Diagnostic Prénatal, Conseil pédagogique national du DIU d’échographie en Gynéco-obstétrique, Collectif Inter-associatif Sur la Santé-Union Nationale des Associations Familiales, Fédération Nationale des Médecins Radiologues, Syndicat National de l’Union des Echographistes, Organisation Nationale Syndicale des Sages-Femmes

  • Source : Conférence nationale d’échographie obstétricale et fœtale, lettre diffusée le 28 octobre 2016. Interview du Dr Roger Bessis, gynécologue-obstétricien, le 8 novembre 2016. Fondation Jérôme Lejeune et le Collectif contre l’Handicaphobie, sites consultés le 8 novembre 2016.

  • Ecrit par : Laura Bourgault- - Edité par : Emmanuel Ducreuzet

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