Violences gynécologiques : le CCNE renforce le consentement

29 mars 2023

Entre les suivis de routine et les éventuelles prises en charge de grossesses et d’accouchements, les femmes vivent en moyenne entre 50 et 80 consultations gynécologiques dans leur vie. A la suite de nombreuses plaintes pour viol dans ce contexte, le Comité consultatif national d’éthique vient de mettre à jour les bases du consentement dans la pratique clinique entre le médecin et la patiente.

Marko Aliaksandr/shutterstock.com

La gynécologie constitue une spécialité des plus délicates à pratiquer tant elle nécessite la technicité du praticien, mais aussi « son savoir-être, sa précaution et son tact ». Tant elle convoque du côté de la patiente « l’intimité, la nudité, l’identité de genre et la sexualité », relèvent les membres du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) ce 29 mars.

Jour choisi pour rendre public l’avis n°124 concernant l’évolution du consentement des patientes au cours d’examens de gynécologie, et/ou de soins touchant à l’intimité féminine. Le CCNE avait été saisi à ce sujet en juillet 2022 par la première ministre Elisabeth Borne, en réponse à de nombreuses plaintes enregistrées pour viol à l’occasion d’examens cliniques.

Restaurer la confiance

Au centre de cette nouvelle définition du consentement : davantage de place donnée à la relation de confiance qui se noue entre le médecin et ses patientes. Le manque voire l’absence de confiance entre le médecin et la patiente a en effet un impact loin d’être anodin. Comme le souligne le CCNE, il peut entraîner « une désaffection de certaines spécialités médicales sous l’effet d’un opprobre collectif et d’atteintes ciblées sur les réseaux sociaux ».

Autre risque : celui « d’une évolution des pratiques médicales non conformes aux besoins réels des patient.e.s et bien sûr [celui] d’une perte de chance pour les patient.e.s ». Ce dernier point étant lié au fait que les femmes ont davantage tendance à renoncer à la consultation, aux soins et aux examens prescrits si elles n’ont pas confiance en leur médecin.

Intimité, pudeur et intégrité

Mais comment faire pour réinstaurer davantage de confiance dans la relation soignant-soigné ? Pour approfondir ce sujet complexe, les membres du CCNE ont échangé avec des représentants des usagers, des gynécologues, des sage-femmes, des doyens des universités de médecine et des internes.

Ils ont notamment remis au centre de la prise en charge « l’expression et le respect du consentement ». Les soins gynécologiques doivent entraîner un maximum « d’écoute et de considération de ce que les patient.e.s ressentent, de prise en compte de la pudeur et du besoin d’intimité, une attention à la douleur ou à l’inconfort que l’examen peut éventuellement occasionner, qu’ils soient exprimés ou non ».

Or, au cours des échanges avec le CCNE, « certains professionnels de santé ont reconnu que l’effort de pédagogie requiert du temps dont ils ne disposent pas suffisamment. (…) Ils et elles peuvent être amené.e.s à neutraliser leurs émotions, parfois au risque de la dépersonnalisation », sont-ils allés jusqu’à préciser.

Le consentement écrit pas obligatoire

Quant à la forme du recueil du consentement, doit-elle évoluer ? Contrairement à d’autres pays européens, « le CCNE ne considère pas pertinent le recueil du consentement de la patiente par l’écrit, ni de demander qu’un tiers soit systématiquement présent pendant l’examen. En revanche, le consentement ne doit plus être tacite ou présumé, mais explicite et différencié pour chaque examen pratiqué durant une consultation », souligne le CCNE.

Des précautions particulières devront par ailleurs être prises « lorsque des élèves ou des étudiants réalisent ou assistent à des examens touchant à l’intimité, et dans le cas d’un.e patient.e. en situation de particulière vulnérabilité : mineur.e, personne en situation de handicap, de détresse psychique, de fragilité cognitive, ou victime de violences ».

A noter : aujourd’hui, les faits et les chiffres manquent pour évaluer précisément ce phénomène de violations de l’intimité en gynécologie. « Le manque de données statistiques fiables ne permet pas d’évaluer de façon globale le vécu des femmes et des hommes, ni les manquements au respect de l’intégrité de la personne dans ce cadre », confirme le CCNE à ce sujet.

  • Source : Comité consultatif national d’éthique (CCNE), le 29 mars 2023

  • Ecrit par : Laura Bourgault - Édité par : Vincent Roche

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