Vous avez eu la Covid-19 et vous toussez encore ? Ce que l’on sait sur cette toux virale

03 février 2025

La toux chronique post-COVID-19 est un motif très fréquent de consultation en médecine générale, et en pneumologie. Selon les études récentes, tousser n’est pas en soi un facteur de gravité de la maladie, ni de mauvais pronostic. Le virus entraînerait une dysfonction neurologique, exacerbant le réflexe de toux. Quoi qu’il en soit, si elle dure plus de 8 semaines, comme n’importe quelle toux chronique, il faut consulter.

Les premières études, quelques mois ou années après le début de la pandémie de Covid-19, ont révélé que la toux pouvait être soit un symptôme isolé, soit associée à d’autres manifestations du Covid long. Dans les premiers mois post-infection, environ 20 % des personnes tousseraient de manière plus ou moins invalidante, tandis qu’une étude réalisée un an après l’infection, et confirmée par d’autres publications, retrouvait seulement 2,5 % des personnes encore touchées par la toux.

Dans le cas d’une toux aiguë, par exemple après une infection virale comme celle causée par le SARS-CoV-2 mais également de la grippe ou autre, la probabilité qu’elle cesse d’elle-même est très élevée. Un examen clinique suffit, et il n’est pas utile de commencer un traitement spécifique, car aucun n’a démontré son efficacité pour abréger la toux, pourtant très gênante au quotidien. En revanche, si la toux persiste au-delà de huit semaines (on parle alors de toux chronique), les chances de résolution spontanée diminuent considérablement.

Toux chronique post-COVID, une toux comme les autres ?

Une étude française sur 70 000 patients montre que les adultes entre 30 et 60 ans sont plus touchés par la toux chronique après une infection au COVID-19 et qu’elle est moins fréquente chez les enfants et les personnes âgées. Par ailleurs, contrairement à ce que l’on pensait, la toux n’est pas un indicateur de gravité de la maladie. Les comparaisons entre les patients Covid-19 survivants et ceux décédés ne montrent aucune différence en termes de fréquence et de gravité de la toux. Une autre étude confirme que, bien qu’une pneumonie liée au COVID puisse être grave, elle ne s’accompagne pas nécessairement d’une toux plus intense. Ces résultats ont été corroborés par plusieurs autres études scientifiques.

Pas de lien direct entre la toux et l’atteinte des poumons dans le Covid-19

Ces constats peuvent s’expliquer par le fait « qu’il n’y a pas de lien direct entre la toux et les lésions pulmonaires dans le cadre du COVID-19, indique le Pr Guilleminault, pneumologue au CHU de Toulouse et spécialiste de la toux. La toux semble être davantage liée à une dysfonction neurologique qu’à une atteinte respiratoire classique. »

En effet, les recherches sur le SARS-CoV-2 et d’autres virus montrent que la toux est davantage liée à l’impact du virus sur le système nerveux qu’à l’infection des poumons eux-mêmes. L’objectif principal du virus est de provoquer une dysfonction neurologique chez l’hôte, ce qui déclenche le réflexe de toux. Ce mécanisme confère un avantage évolutif au virus, car il augmente ainsi ses chances de se propager et d’infecter d’autres individus, comme dans le cas du COVID-19 ou de la grippe.

La toux est donc un réflexe complexe, encore partiellement compris, qui commence lorsque certains récepteurs de la toux situés principalement dans les voies respiratoires détectent des irritants. Ces récepteurs transmettent l’information au tronc cérébral. Habituellement, des mécanismes cérébraux (dits inhibiteurs) empêchent que la toux se produise sans raison. C’est pour cela que nous ne toussons pas tout le temps, même si des stimuli légers sont présents. Mais si ce mécanisme de contrôle est perturbé, en particulier par l’activation des récepteurs par le virus de la Covid, la toux peut alors se déclencher de façon excessive.

Pourquoi continuer à tousser une fois guéri de la Covid ?

La question reste posée. Si le virus est capable d’activer des récepteurs de la toux pour la provoquer chez un être humain, pourquoi continue-t-on à tousser une fois guéri de l’infection et donc débarrassé du virus ? Selon les dernières données, il semble que l’infection virale augmente la sensibilité du réflexe de toux. Une fois guéri, cette hypersensibilité diminue progressivement, mais chez certains individus, ces mécanismes mettent du temps à se rétablir, plus précisément ceux qui inhibent la toux.

Quand consulter pour une toux post-covid ?

« Une période de 8 à 12 semaines post-infection constitue un seuil raisonnable pour envisager des explorations et par conséquent un traitement adapté », conseille Laurent Guilleminault.

Votre médecin pourra utiliser une échelle visuelle analogique (graduée entre 0 et 10) pour évaluer l’intensité de la toux. Il faudra ensuite rechercher d’éventuelles causes. En effet, bien que la toux puisse être associée au Covid-19, elle peut aussi coïncider avec une autre pathologie, comme un cancer bronchique. Chez un patient fumeur, un scanner thoracique devra donc être envisagé pour exclure toute pathologie cancéreuse ou précancéreuse voire une autre maladie (pneumopathie interstitielle diffuse…).

Bien entendu, le tabagisme, facteur aggravant de la toux, devra être arrêté. Certains médicaments devront également être stoppés de manière ponctuelle, comme ceux utilisés en cardiologie et bien connus pour provoquer la toux (inhibiteurs de l’enzyme de conversion, IEC), afin de vérifier leur éventuelle implication. Le médecin pourra également procéder à un bilan pour éliminer les trois principales causes classiques et courantes de toux : la rhinosinusite, l’asthme (dont des études ont montré qu’il pouvait parfois être déclenché par la Covid-19) et le reflux gastro-œsophagien (RGO).

Ne pas oublier le larynx, un organe qui fait tousser

De plus, les anomalies du larynx, un organe particulièrement susceptible de provoquer la toux, sont fréquentes dans le cadre de la toux post-Covid-19. Explication : l’innervation du larynx étant complexe, le virus peut affecter ces zones spécifiques, entraînant une hypersensibilité du réflexe de toux.

Et si aucune de ces causes n’est identifiée, la toux chronique est alors qualifiée de TROCRI, c’est-à-dire une « toux chronique réfractaire et inexpliquée ». Cela signifie qu’aucune maladie spécifique ne provoque la toux, mais qu’il existe une dysfonction du système nerveux, probablement induite par l’infection par le SARS-CoV-2 mais possiblement aussi par bien d’autres causes. Dans ce cas, le médecin peut recourir à des traitements neuromodulateurs.

Pour en savoir plus : Toux après une infection : pas d’inquiétude avant deux mois

 

  • Source : Suivi du congrès de pneumologie CPLF 2025 Marseille 24 janvier / 14:30-16:00 | Endoume 1.2.3 | A03 Toux chronique et environnement ; Guilleminault L, Demoulin-Alexikova S, de Gabory L, et al. Guidelines for the management of chronic cough in adults. Respir Med Res. 2023 Jun;83:101011 ; COVID-19 symptoms at hospital admission vary with age and sex: results from the ISARIC prospective multinational observational study.Infection 49, 889–905 (2021) ; Eur Respir J. 2020 Sep 24;56(3):2050524 ; Lancet. 2020 Mar 28;395(10229):1038 ; Phys Fluids (1994). 2021 Mar 1;33(3):031704

  • Ecrit par : Hélène Joubert - Édité par Emanuel Ducreuzet

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