Alcoolisation fœtale : comment elle tue les cellules du cerveau
20 avril 2017
Jammart Baptiste ©Inserm
La consommation d’alcool est à proscrire absolument pendant la grossesse. Les effets néfastes sur le développement du fœtus sont largement documentés. Les enfants peuvent souffrir de troubles graves du comportement et de l’apprentissage, voire présenter un syndrome d’alcoolisation fœtale. Une équipe de l’Inserm a découvert le mécanisme au cœur de la toxicité de l’alcool sur le système nerveux des enfants à naître.
« Au niveau du système nerveux, on sait que l’alcool augmente la mort neuronale, notamment par apoptose, et altère l’autophagie, un phénomène de nettoyage et de recyclage des cellules », notent les auteurs de ce travail sur les mécanismes sous-tendant les effets de l’alcoolisation fœtale. Cependant, son action toxique dans le cas d’une exposition prénatale était jusque-là inconnue. Les recherches effectuées par l’unité Inserm 1245 de l’Université de Rouen ont permis de les décrypter.
Résultats, « une altération de l’autophagie peut également être observée dans les cellules endothéliales après une exposition prénatale à l’alcool ». Une telle exposition induit une altération de l’arborescence de la vascularisation cérébrale alors même que celle-ci est un pré-requis pour la migration de certaines populations neuronales au cours du développement. Il apparaît donc à présent que ces anomalies vasculaires s’accompagnent d’une augmentation de la mortalité des cellules endothéliales.
Des troubles longtemps invisibles
Le syndrome d’alcoolisation fœtale (SAF) constitue la forme la plus sévère des troubles engendrés par la consommation d’alcool des femmes enceintes. Première cause de paralysie cérébrale d’origine non génétique chez l’enfant, ce syndrome concerne environ 1,3 enfant pour 1 000 naissances vivantes en France.
Mais tous les enfants exposés à l’alcool in utero ne manifestent pas de manière aussi visible leurs troubles. Pour autant, ils en souffrent bien. Ainsi, nombreux sont les enfants qui manifestent tardivement des troubles de l’apprentissage ou du comportement. « Le diagnostic est posé avec retard, après plusieurs années, une fois que tous les processus de maturation cérébrale ont abouti. Résultat : aucune prise en charge ne peut plus leur être proposée », se désolent les chercheurs.
Vers un dépistage systématique ?
Le travail de l’équipe a pour objectif d’« identifier un marqueur périphérique de la toxicité cérébrale qui serait utilisable à la naissance pour repérer une anomalie et, à terme, proposer un traitement précoce aux enfants concernés », insistent les auteurs. « En collaboration avec le service de Pédiatrie néonatale, réanimation, neuropédiatrie du CHU de Rouen, l’équipe cherche désormais à caractériser des biomarqueurs permettant un diagnostic précoce et à identifier des cibles thérapeutiques. Objectif, dépister systématiquement les nouveau-nés à la maternité. »
En attendant, la meilleure prévention reste de respecter le zéro alcool pendant toute la grossesse. D’autant que « l’on ne connaît toujours pas les fenêtres de vulnérabilité au cours desquelles le système nerveux des enfants à naître a le plus de risque d’être altéré en présence d’alcool », concluent les auteurs.