Biotrial : des éclairages sur l’origine de l’accident

09 mars 2016

Mis en place après l’accident survenu lors de l’essai clinique Biotrial, le Comité Scientifique Spécialisé Temporaire (CSST) étudie l’origine du décès et des cinq hospitalisations survenus à Rennes en janvier 2016. Les premières conclusions ont été rendues.

Le protocole mené à Rennes « ne comportait a priori pas d’élément (…) de nature à contre-indiquer ou retarder l’autorisation de cet essai », relaient les experts du CSST rattachés à l’Agence nationale du Médicament (ANSM). Mais des points méritent d’être éclairés. « L’essai n’a pas été immédiatement suspendu alors que l’un des volontaires avait été hospitalisé suite à une dégradation brutale de son état de santé ». Par ailleurs, l’essai inclut une molécule à « visée neurobiologique centrale ». Or aucune évaluation neuropsychologique (bilan et tests cognitifs en complément des tests cliniques) n’a été effectuée pour sélectionner les volontaires. Enfin l’augmentation des doses administrées au cours de l’étude s’avère « problématique car trop brutale (…) Ce point très important devra faire l’objet de recommandations ».

Des explications ?

Selon le CSST, « un des éléments les plus frappants du dossier est l’absence de toxicité chez des volontaires », n’ayant présenté aucun symptôme. Survenue dans l’une des quatorze cohortes de volontaires, l’éventuelle toxicité de la molécule pourrait également s’expliquer par :

  • Une erreur d’administration ou de procédure touchant spécifiquement cette cohorte. Mais cette piste est jugée « peu probable (…) Le produit utilisé pour les études de toxicologie était le même que celui utilisé dans les gélules administrées à tous les groupes volontaires (…) et a été évalué comme étant de grande pureté » ;
  • Une particularité commune aux six sujets ayant présenté des signes de toxicité. Se pose la question d’une éventuelle interaction de la molécule BIA10-2474 avec d’autres produits. Et plus précisément des effets de ce mélange sur le système endocannabinoïde. Mais à ce jour, aucune donnée « crédible ne plaide en faveur d’une consommation de médicaments ou de stupéfiants, immédiatement, avant ou pendant le séjour à Biotrial ».

Quelles recommandations ?

Pour le CSST, les pratiques des essais cliniques doivent gagner en clarté et devenir plus strictes. Notamment en imposant une évaluation neuropsychologique dans la sélection des volontaires en cas d’expérimentation de médicaments ciblant « le système nerveux central ». Autre point recommandé par le CSST, des tests sur des gammes de doses différentes devront être pratiqués en phase préclinique chez l’animal avant de passer aux expérimentations sur l’Homme. Enfin, les variations de dosage d’une molécule au cours des études devront être solidement argumentées. Des précisions seront apportées par le CSST le 24 mars prochain.

  • Source : Agence nationale de Sécurité sanitaire du Médicament et des Produits de Santé (ANSM), Comité Scientifique Spécialisé Temporaire (CSST), le 7 mars 2016

  • Ecrit par : Laura Bourgault : Edité par : Emmanuel Ducreuzet

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