Comment les œstrogènes influencent-ils la consommation excessive d’alcool chez les femmes ?

02 janvier 2025

Selon une récente étude américaine, les œstrogènes pousseraient les femmes à boire de manière excessive dans les 30 minutes qui suivent la première gorgée. Explications.

La consommation excessive d’alcool chez les femmes est-elle liée aux œstrogènes ? C’est ce que suggère une étude publiée dans la revue Nature communications le 30 décembre. Concrètement, la présence en grande quantité d’œstrogènes, hormone produite par les ovaires et liée au cycle menstruel, pousserait les femmes a consommé davantage d’alcool surtout dans les 30 minutes qui suivent la première gorgée.

En 2021 déjà, le Dr. Kristen Pleil, professeure associée en pharmacologie à Weill Cornell Medical (New-York), et son équipe avaient montré qu’une sous-groupe de neurones d’une région du cerveau appelée noyau du lit de la strie terminale (BNST) était plus excitable chez les souris femmes que chez les mâles, une activité accrue corrélée à une consommation excessive d’alcool.

Des consommations supérieures d’alcool lors des pics d’œstrogène

Pour expliquer ce mécanisme, les chercheurs de Weill Cornell Medecine ont surveillé les niveaux d’hormones tout au long du cycle (cycle œstral de 4 à 5 jours) chez des souris femelles. Pourquoi suivre cette piste ? « Les œstrogènes ont des effets si puissants sur de nombreux comportements, en particulier chez les femelles », a déclaré le Dr Pleil, dans un communiqué. « Il est donc logique qu’il module également la consommation d’alcool ». 

De l’alcool a ainsi été donné aux souris femelles : les chercheurs ont découvert que plus celles-ci présentaient un taux élevé d’œstrogènes, plus elles buvaient d’alcool. Et cette « boulimie » était effectivement corrélée à une activité accrue des neurones du BNST. « Lorsqu’une femelle prend sa première gorgée d’alcool, ces neurones deviennent fous », a expliqué le Dr Pleil. « Et si elle présente un niveau d’œstrogènes élevé, ils deviennent encore plus fous. » Cette activité neuronale supplémentaire inciterait les souris femelles à boire davantage, en particulier dans les 30 minutes qui suivent la première gorgée.

Un traitement pour la prise en charge de l’alcoolisme ?

Les scientifiques ont en outre réussi à montrer comment les œstrogènes devenaient le chef d’orchestre du comportement de la souris. Celui-ci se lie aux récepteurs à la surface des neurones, où elle module directement la communication entre cellules. « Nous pensons que c’est la première fois que quelqu’un démontre que pendant un cycle œstral normal, l’œstrogène endogène produit par les ovaires peut utiliser un mécanisme aussi rapide pour contrôler le comportement », a déclaré le Dr Pleil.

Ainsi, inhiber l’enzyme qui synthétise les œstrogènes pourrait constituer un traitement contre la consommation excessive d’alcool lorsque les niveaux d’hormones sont au plus haut. Ce médicament a déjà été approuvé par la FDA pour le traitement des femmes atteintes d’un cancer hormonodépendant. « L’association de ce médicament avec des composés qui modulent les effets en aval des substances chimiques produites par les neurones BNST pourrait potentiellement fournir une nouvelle approche ciblée pour le traitement des troubles liés à la consommation d’alcool », a estimé le Dr. Pleil.

Cette étude offre un nouvel éclairage sur les comportements féminins face à l’alcool. « Nous en savons beaucoup moins sur ce qui motive la consommation d’alcool chez les femmes, car la plupart des études ont été réalisées sur des hommes », a déclaré le Dr Kristen Pleil. Et ce alors que les femmes sont plus sensibles aux effets négatifs de l’alcool sur la santé que les hommes.

  • Source : Nature Communications, Weill Cornell Medecine

  • Ecrit par : Ecrit par Dorothée Duchemin – Edité par Emmanuel Ducreuzet

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