Covid long : quand le virus survit dans les muqueuses
03 mai 2023
Comment les symptômes du Covid-19 peuvent-ils s’exprimer aussi longtemps après la phase aiguë ? Selon des chercheurs de l’Inserm, la persistance du SARS-CoV-2 dans les muqueuses serait une bonne explication. Et une voie possible de diagnostic.
Quand les patients atteints du Covid-19 présentent encore des symptômes dans les trois mois suivant la phase aiguë, on parle de Covid long. Cette maladie perdure ainsi pour 10 à 30% des cas. Il s’agit là d’estimations, étant donné que « cet état est encore difficile à diagnostiquer et à traiter », relaient des chercheurs franco-portugais* qui se sont penchés sur le sujet.
Comment expliquer que certains souffrent encore de séquelles physiques ou psychologiques à moyen terme ? Pour en savoir plus, l’équipe du Pr Jérôme Estaquier a analysé le système immunitaire de 164 patients sur une durée de 6 mois. Au total, 127 souffraient d’un Covid long, et présentaient toujours des épisodes d’essoufflements, de toux, de douleurs musculaires et/ou thoraciques, ou encore d’anxiété. Et 37 volontaires épargnés donc par un Covid long ont composé le groupe contrôle.
Comparer le niveau d’inflammation
Les scientifiques sont partis à la recherche des cellules CD8, des lymphocytes « impliqués dans l’élimination du virus et les anticorps dirigés contre le SARS-CoV-2 ». De quoi repérer l’activité immunitaire en temps réel, ce contre quoi l’organisme est en train de se défendre.
Pour 72 des participants, les chercheurs avaient en leur possession des prélèvements sanguins effectués pendant la phase aiguë de la maladie. Avec tout ce matériel, « nous avons pu rétrospectivement comparer le niveau d’inflammation au stade précoce chez les personnes ayant développé par la suite un Covid long ou non », relaient les scientifiques.
Des marqueurs sanguins repérés chez 70 à 80% des patients
Selon leurs résultats, « un certain nombre de marqueurs sanguins sont présents six mois après l’infection chez 70 à 80 % des personnes présentant un Covid long alors que ces mêmes marqueurs sanguins étaient rares chez les sujets n’ayant pas développé de forme longue ».
Autres données révélées dans l’étude : « un sous-type de CD8 (…) [est présent] en faible quantité. » Ces dernières CD8 se trouvent justement impliquées dans le contrôle du virus dans les muqueuses. Localisé au niveau des muqueuses pulmonaires dans un premier temps, ce coronavirus « pourrait donc descendre au niveau intestinal et y persister sans que le système immunitaire ne parvienne à l’éliminer tout à fait ». Les chercheurs ont également pu faire le lien entre une réponse inflammatoire aiguë et le risque de développer un Covid dans sa forme longue.
Et après ? De plus amples études seront à mener sur le sujet, et voir dans quelle mesure cette persistance du Covid dans certaines muqueuses pourrait participer à un meilleur diagnostic et à une prise en charge précoce des Covid longs.
*des équipes de recherche de l’Inserm et d’Université Paris Cité en collaboration avec l’université de Minho à Braga (Portugal). Ces travaux ont été soutenus en France par la Fondation pour la Recherche Médicale, l’Agence nationale de la recherche (ANR) et l’Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales(ANRS)
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Source : Inserm, le 3 mai 2023 – Nature Communications, 30 mars 2023
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Ecrit par : Laura Bourgault - Édité par : Vincent Roche