Deuil : les clés pour soutenir un proche qui a perdu un être cher
24 janvier 2025
Plus de la moitié des personnes endeuillées ont été blessées par certaines attitudes de leur entourage. Les proches, les amis ou les collègues ont souvent peur de déranger, d’« appuyer là où ça fait mal », et préfèrent se taire. On fait « comme si » tout allait bien. Mais parfois, des maladresses peuvent être tout aussi douloureuses que le silence. Comment se comporter au mieux ? Les conseils de Laurence Picque, psychothérapeute clinicienne spécialiste du deuil.
Destination Santé : Que peut faire l’entourage pour soutenir une personne endeuillée ?
Laurence Picque : Une des rares solutions contre l’isolement que vit la personne endeuillée est l’importance des rituels et des rites dans le processus de deuil, auxquels doit participer l’entourage. Qu’il s’agisse des funérailles ou d’autres cérémonies, ces moments sont essentiels pour marquer la perte et rendre hommage à la personne disparue. Ils permettent de reconnaître la place de l’être cher dans l’histoire de ceux qui restent, de souligner qu’il a eu un rôle dans la société et sur la Terre, qu’il n’a pas été invisible. Ces rituels jouent un rôle fondamental, non seulement pour la mémoire collective, mais aussi pour aider les endeuillés à trouver un sens à leur souffrance et à leur perte. Ils participent à la reconnaissance de la douleur vécue, dans un cadre socialement et culturellement accepté.
A ce propos, depuis quelques décennies, on observe une multiplication des rituels laïques ?
C’est exact, avec des cérémonies de deuil qui intègrent des symboles, des gestes, et des paroles qui donnent du sens à l’événement. Ces rituels permettent aux personnes endeuillées de traverser le deuil de manière plus structurée, comme un rite de passage, tout en comblant un vide laissé par l’absence de rituels religieux. Ces rituels laïques viennent répondre à ce besoin de sens et de reconnaissance, en permettant à l’endeuillé de marquer symboliquement la perte tout en réaffirmant l’importance de la personne disparue dans l’histoire collective et individuelle.
“L’entourage doit être proactif, en prenant régulièrement des nouvelles de la personne.”
Quelle attitudes, postures peuvent être aidantes pour l’endeuillé ?
L’attitude aidante vis-à-vis d’une personne endeuillée est souvent mal interprétée, et cela crée parfois des situations où l’endeuillé se sent encore plus isolé. Beaucoup de gens, dans un souci de bien faire, disent souvent : « je suis là si tu as besoin, appelle-moi » ou « n’hésite pas… ». Cependant, ceux qui traversent un deuil, par pudeur ou par crainte de déranger, ne feront généralement pas appel à leur entourage. Ils se sentent rarement légitimes à demander de l’aide, ce qui rend l’attitude de l’entourage essentielle. Ce que je préconise, c’est de ne pas attendre que la personne endeuillée fasse le premier pas. L’entourage doit être proactif, en prenant régulièrement des nouvelles de la personne. Par exemple, un petit texto, un appel pour savoir comment la personne va aujourd’hui, dans son présent, comment elle vit son deuil, où elle en est, peuvent être des gestes simples mais utiles. Cela montre à la personne endeuillée qu’elle est soutenue, même si elle ne sollicite pas directement de l’aide.
Mais on a souvent peur de déranger, parler du défunt c’est « appuyer là où ça fait mal » ?
On craint d’être maladroit, d’évoquer la personne décédée, de raviver la douleur. Pourtant, c’est justement en parlant de la personne décédée, en évoquant les souvenirs, que le processus de deuil se fait. L’endeuillé aura besoin de partager ses émotions et ses souvenirs, et c’est souvent par ces échanges qu’il pourra trouver un certain apaisement. Au contraire, passer sous silence la personne disparue ou faire comme si rien ne s’était passé peut empêcher le deuil de se structurer. La dynamique doit ainsi être inversée : il ne faut pas attendre que la personne endeuillée fasse appel à nous, mais plutôt prendre l’initiative de montrer qu’on est là, prêt à écouter, sans juger, avec bienveillance et empathie.
Vous ne devez pas avoir peur d’ennuyer, de brusquer ou de blesser. Au contraire, il est important de réitérer, de renouveler votre sympathie, de raviver la mémoire de l’autre et de montrer votre disponibilité pour l’autre.
Pour en savoir plus sur la mort et le deuil mais aussi être accompagné ou suivre une formation : Happy end, média en ligne
Laurence Picque est psychothérapeute clinicienne spécialiste du deuil, formatrice diplômée intervenant pour Happy end. Elle est également la présidente de la Fédération européenne Vivre son deuil.