Diagnostiquer un cancer par une prise de sang ?

22 février 2017

Lorsqu’un cancer est invasif, cela signifie que certaines cellules tumorales ont été diffusées dans la circulation sanguine. Leur détection est enfin permise de façon très fine et fiable par une méthode basée sur une simple prise de sang, mise au point par une équipe française. Un espoir important pour le diagnostic du cancer mais aussi pour établir un traitement adapté en fonction des mutations de la tumeur.

« La précocité du diagnostic et de la prise en charge thérapeutique constituent des facteurs pronostiques essentiels pour les possibilités de rémission du patient », rappelle Patrizia Paterlini-Bréchot*, l’auteur principal de l’étude**. Avec son équipe, elle a mis au point une méthode baptisée ISET capable de détecter très précocement des cellules rares circulantes (CRC) présentes dans le sang, et annonçant très en amont l’apparition d’une tumeur cancéreuse.

« Nos travaux ont permis de montrer qu’il est possible de détecter une seule cellule tumorale dans 10ml de sang », détaille le Pr Paterlini-Bréchot. Cette technique innovante « permet donc d’atteindre un très haut niveau de précision dans le diagnostic des cancers invasifs sur un très faible échantillon sanguin ». L’intérêt ? « Rendre possible le diagnostic d’une tumeur invasive le plus précocement possible, car dans ce contexte les cellules circulantes sont rares, mais leur malignité est encore limitée ». Et ce, avant que l’imagerie ne montre le nodule.

Précision d’importance toutefois, « le test n’est pas encore capable de dire de quel organe dérivent les cellules », note Patrizia Paterlini-Bréchot. De plus, il est valable pour tout type de cancer solide, mais pas pour certaines leucémies et certains lymphomes.

Le choix judicieux du traitement

Une fois le cancer diagnostiqué, la technique ISET permet aussi « d’analyser les protéines et l’ADN d’une cellule isolée », poursuit-elle. Fournissant ainsi des données cruciales pour choisir le meilleur traitement. Notamment en fonction de certaines mutations de la tumeur.

Enfin, le fait d’avoir réussi à isoler ces cellules tumorales vivantes puis à les cultiver in vitro ouvre de nombreuses perspectives sur la thérapie du cancer. « En effet, la culture in vitro des cellules cancéreuses permettra à l’avenir de tester des thérapies en amont afin de savoir si elles peuvent agir sur ces cancers », précise le Pr Paterlini-Bréchot. « La technique pourrait permettre d’utiliser les cellules cancéreuses circulantes cultivées pour stimuler la réponse immunitaire de l’organisme contre le cancer, une perspective porteuse de grand espoir dans le combat contre cette maladie », conclut-elle.

A noter : Tous les droits d’auteur perçus par la chercheuse pour son livre Tuer le cancer sont reversés à la recherche académique pour développer complètement la technique de diagnostic précoce des cancers invasifs. C’est l’Association SafeTestsForLife (STL) qui récolte les dons (www.stl-don.org).

*professeur en biologie cellulaire et oncologie à l’Université Paris Descartes et chercheuse au sein du département « Immunologie, infectiologie et hématologie » de l’Institut Necker Enfants Malades – Centre de médecine moléculaire (Université Paris Descartes/ Inserm / CNRS)

** Laget S et al, Technical Insights into Highly Sensitive Isolation and Molecular Characterization of Fixed and Live Circulating Tumor Cells for Early Detection of Tumor Invasion. PlosOne 2017.

  • Source : interview du Pr Patrizia Paterlini-Bréchot, 16 février 2017 – Université Paris-Descartes, AP-HP, CNRS, 30 janvier 2017

  • Ecrit par : Dominique Salomon - Edité par : Emmanuel Ducreuzet

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