Drogue : qu’est-ce que la kétamine, dont l’usage festif se répand ?

16 janvier 2025

Selon le rapport de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) qui vient de paraître, l’usage de la kétamine, un anesthésique détourné comme drogue récréative, gagne du terrain. Mais cette substance cause de graves dommages parfois irréversibles.

Depuis vingt-cinq ans, le dispositif Tendances récentes et nouvelles drogues (TREND) de l’OFDT analyse la consommation des drogues. Les observations pour l’année 2023 mettent en lumière l’usage croissant de la kétamine pour un usage festif. Cette substance illicite touche désormais des publics plus diversifiés et plus nombreux qu’auparavant. Avec, à la clé, de plus en plus de signalements de complications pour la santé liées à une consommation chronique.

2,6 % des 18 à 64 ans déclarent en avoir déjà consommé au cours de leur vie.

Qu’est-ce que la kétamine ?

La kétamine agit en bloquant certains récepteurs du cerveau, en particulier les récepteurs NMDA, ce qui entraîne une altération de la perception de la douleur, une dissociation de l’esprit par rapport au corps, et un état d’amnésie temporaire.

Du fait de ses effets psychoactifs, elle a rapidement été détournée de son usage médical vers des usages récréatifs. Elle est utilisée pour ses effets de dissociation (altération de la perception du corps ou du monde extérieur), d’euphorie et de décorporation (le sentiment de se détacher de son propre corps). À des doses plus élevées, elle peut provoquer des expériences intenses appelées “k-holes” (perte de conscience partielle ou totale).

La kétamine n’est plus perçue comme une « drogue à part »

Les pratiques autour de cette substance ont profondément changé au cours des dix dernières années. Elle est désormais consommée par une population socio-démographique diverse, rapporte l’OFDT, dans des contextes festifs variés tels que les festivals, les soirées en clubs ou à domicile.

Toujours selon l’OFDT, les données récentes révèlent une augmentation des usages chroniques de kétamine dans le but de soulager des souffrances psychiques, comme l’angoisse ou la dépression, ou des douleurs physiques (règles, lombalgies, endométriose…).

Quels risques ?

L’usage chronique de kétamine, répété sur plusieurs mois ou années, entraîne des conséquences graves sur la santé, indique Drogues-info-service. Parmi celles-ci figurent des maladies urinaires sévères, lesquelles peuvent devenir irréversibles si elles ne sont pas traitées précocement. Des douleurs abdominales intenses, connues sous les noms de « K-pain » ou « K-cramps », sont également fréquentes. Ces crampes, allant de simples douleurs abdominales à des coliques très douloureuses, disparaissent généralement après l’arrêt de la consommation.

L’usage chronique et à fortes doses peut également provoquer une insuffisance rénale, parfois irréversible, ainsi que des atteintes graves du foie. Enfin, des troubles de la mémoire, touchant à la fois le court et le long terme, peuvent survenir, le plus souvent réversibles après l’arrêt de la kétamine.

Les troubles urologiques liés à la kétamine, un problème majeur

Les troubles urologiques causés par l’usage chronique de kétamine après seulement quelques mois peuvent être graves, au point que l’Association française d’urologie a publié des recommandations spécifiques en octobre 2024. Une étude révélait que ces troubles incluent une douleur sus-pubienne intense chez 60 % des patients, des mictions très fréquentes (jusqu’à 50 par jour) dans 77 % des cas, ainsi que des envies pressantes et intenses d’uriner chez 70 % des sujets. D’autres dysfonctionnements urinaires sont courants, comme des douleurs lors de la miction, une incontinence urinaire, et, dans 30 % des cas, une obstruction partielle ou totale de l’écoulement urinaire, et une atteinte rénale.

Les troubles urinaires peuvent être réversibles dans 50 à 85 % des cas, selon les études. Mais parfois, il est même nécessaire de faire appel à la chirurgie reconstructrice.

  • Source : Numéro 166 de la publication "Tendances" de l'Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT), publié le 14 janvier 2025 ; Clément Gérome ; Bourillon A, Cornu JN, Herve F, Pangui R, Thuillier C, Doizi S, Lebdai S, Peyronnet B; members of the CUROPF; CTMH. Management of ketamine cystitis: National guidelines from the French Association of Urology (CUROPF/CTMH). Fr J Urol. 2024 Nov;34(14):102754 ; État de l’Art 22 - Drogues et troubles mictionnels François MEYER/ CFU 2024 21/11/24

  • Ecrit par : Hélène Joubert - Édité par Emanuel Ducreuzet

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