Ebola : «des systèmes de santé dépassés»
02 octobre 2014
Dans certains centres de santé ou hôpitaux, les soignants n’ont ni formation ni matériel pour lutter contre l’épidémie. ©Martin Zinggl
Pour lutter contre l’épidémie de virus Ebola, les professionnels de santé sont essentiels. Or déjà peu nombreux dans les pays les plus touchés comme le Libéria, beaucoup de médecins, infirmiers et aide soignants ont déserté les hôpitaux et les centres de santé. Par peur de la contamination par le virus et, parce que, sans moyens adéquats, ils étaient impuissants face à la propagation de l’épidémie. Les malades d’Ebola, comme ceux du paludisme et d’autres pathologies toujours présentes en paient le prix fort.
« Les pénuries de travailleurs de la santé ont été un facteur majeur de l’épidémie actuelle du virus Ebola en Afrique de l’Ouest », estime l’Organisation mondiale de la Santé. Une réalité que les organisations non gouvernementales (ONG) tentent d’enrayer depuis des mois sur le terrain. En vain pour le moment. « La fièvre Ebola ne cesse de progresser et les infrastructures sanitaires déjà défaillantes des trois pays les plus touchés (Libéria, Sierra Leone et Guinée) sont dépassées », alerte Médecins du Monde (MdM).
Pourquoi les professionnels de santé manquent-ils à l’appel ? D’abord, dans ces pays et en particulier dans les zones rurales, les médecins étaient déjà rares avant l’épidémie. Ainsi, « les pays d’Afrique subsaharienne ont-ils en moyenne 2 médecins et 11 infirmières ou sages-femmes pour 10 000 habitants, contre 30 médecins et 84 infirmières ou sages-femmes dans les pays à revenu élevé », selon la Banque mondiale. Par ailleurs, non formés à la prise en charge d’Ebola et manquant de matériel suffisant, les professionnels de santé se sont retrouvés démunis face à l’épidémie. Un grand nombre a d’ailleurs été contaminé. « Plus de 40% des personnels de santé s’étant occupé de malades d’Ebola sont morts [au Libéria] », nous indique Gilbert Potier, directeur des opérations internationales de MdM.
Paludisme, appendicite… les autres maladies ne sont pas soignées
Résultat, « une partie du personnel médical a déserté par crainte du virus », explique Pierre Sallah, coordinateur général MdM au Libéria. L’ONG française travaille actuellement, avec d’autres organisations, à redonner des moyens à tout le système sanitaire du pays. « Nous formons 400 travailleurs sanitaires libériens qui devront sensibiliser la population au virus », explique Gilbert Potier. L’organisation forme également des agents de santé et essaie d’apporter un soutien aux structures de santé avec la livraison de gants, de masques…
Dans le même temps, « beaucoup de patients évitent les centres de santé pour les mêmes raisons [par peur d’être contaminés]. Et du coup, les autres pathologies, qui restent mortelles, comme le paludisme, ne sont plus soignées », souligne Pierre Sallah. « Pour contrer cette situation, nous envoyons des tests de diagnostic rapides du paludisme et d’autres maladies, aux centres qui en manquent », explique Gilbert Potier. L’objectif étant de « mettre en place une politique de tri sanitaire permettant d’isoler les patients d’Ebola tout en soignant aussi les autres, sans les exposer au virus mortel. »
La confusion est facile. « Parmi les symptômes d’Ebola, on retrouve toujours une fièvre importante », note Gilbert Potier. Or une température élevée peut aussi être le signe d’autres pathologies, comme le paludisme. « De nombreux cas de fièvres ont certainement été pris pour des manifestations d’Ebola, alors qu’il n’en était rien. » Du coup, tandis que les centres de prise en charge Ebola sont surchargés, « des patients porteurs d’autres maladies les ‘encombrent’, tout en risquant d’être contaminés pour de bon », souligne Gilbert Potier. Et en même temps, d’autres malades, réellement infectés, ne viennent pas se faire soigner dans les centres d’isolement par peur. Le travail d’information des populations risque d’être encore long…
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Source : interview de Gilbert Potier, directeur des opérations internationales de Médecins du Monde (MdM), 1er octobre 2014 - OMS, 1er octobre 2014 – MdM, 30 septembre 2014
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Ecrit par : Dominique Salomon - Edité par : Emmanuel Ducreuzet