Incontinence anale : l’espoir de la thérapie cellulaire
30 mai 2017
Antonio Guillem/shutterstock.com
L’incontinence anale touche un million d’individus en France. Cette affection entraîne un lourd handicap pour le patient. Or le traitement de référence consiste en l’implantation d’un matériel exogène, c’est-à-dire hors du corps. Une équipe rouennaise a peut-être trouvé une alternative thérapeutique efficace et moins contraignante à base de cellules souches.
La forme sévère de l’incontinence anale touche 350 000 patients en France. Et elle concerne particulièrement la femme jeune juste après un accouchement puisque 10% à 15% d’entre elles en souffrent. Au final, 4% à 5% gardent une incontinence chronique sévère. Parmi les causes, la rupture ou dysfonction sphinctérienne se caractérise par le fait que les sphincters, ces muscles circulaires qui entourent la zone anale, perdent leur capacité à se contracter correctement.
Une équipe de l’Inserm de Rouen* a mis au point un essai clinique de thérapie cellulaire. Le principe, utiliser des cellules souches adultes, appelées myoblastes, capables de se différencier en cellules musculaires efficaces. Avec pour objectif de compenser les défaillances des sphincters.
Cultiver des fibres musculaires fonctionnelles
Une fois que le principe et la stabilité génétique des myoblastes ont été validés sur un modèle animal, l’essai clinique a pu être mené chez l’être humain. Ainsi, 24 patients ont-ils participé à ce travail. La moitié d’entre eux recevant le traitement innovant et l’autre, un placebo.
Concrètement, « un fragment musculaire a été prélevé chez les patients eux-mêmes au niveau de la cuisse », expliquent les auteurs. « Puis, les myoblastes ont été cultivés afin d’en obtenir un nombre suffisant. Enfin, ils ont été injectés sous contrôle échographique dans le sphincter défaillant afin de se différencier en fibres musculaires fonctionnelles. »
Résultat, le suivi du score d’incontinence (score de Cleveland) des participants, réalisé 6 mois puis 1 an après l’injection de cellules souches a montré de très bons résultats pour cette nouvelle stratégie. Dans le détail, « un an après l’injection, le traitement a fonctionné chez 7 personnes sur 12 (58%) alors que seule 1 patiente sur 12 (8%) avait vu son incontinence s’améliorer dans le groupe placebo », expliquent les chercheurs. « Le score d’incontinence a ainsi diminué significativement de 15 à 6,5 points chez les personnes traitées alors qu’il demeure de 14 en moyenne au sein du groupe placebo. »
Les participants passent du placebo au traitement innovant
« Face à ces bons résultats, les patients du groupe placebo qui le désiraient ont pu bénéficier de l’injection de leurs cellules musculaires qui avait été cryoconservées », indiquent les auteurs. « Leur suivi a montré un taux de réponse aussi satisfaisant que celui du 1er groupe. »
*l’Unité Inserm 1234 “Physiopathologie, auto-immunité, maladies neuromusculaires et thérapies régénératrices” associée à l’Université de Rouen Normandie et au laboratoire de biothérapies et du service de chirurgie digestive du CHU de Rouen.