Le suicide, 2e cause de mort maternelle en France
06 janvier 2021
L’hémorragie obstétricale n'est plus la première cause de décès maternel en France. La 6e édition de l'Enquête nationale confidentielle sur les morts maternelles, menée entre 2013 et 2015, indique que les maladies cardiovasculaires et les suicides en sont devenus les principales causes.
Entre 2013 et 2015, 262 décès maternels ont été recensés en France. Par décès maternel, on entend la période qui s’étend « de la conception jusqu’à un an après l’accouchement » précisent l’Inserm et Santé Publique France, qui publient cette enquête. Elle est le fruit d’une surveillance menée par des gynécologues-obstétriciens, des anesthésistes réanimateurs, des sages-femmes et des épidémiologistes en France métropolitaine et dans les DOM.
Que nous apprend cette 6e enquête ? Que le nombre de femmes décédées un an après leur accouchement est relativement stable par rapport aux deux enquêtes précédentes (2007-2009 et 2010-2012) : il s’établissait alors à 254 décès. Auparavant, les morts maternelles étaient majoritairement la conséquence d’hémorragies obstétricales ; leur nombre a été divisé par deux en 15 ans. Cette 6e édition nous apprend que les maladies cardiovasculaires et les suicides sont désormais les premières causes de mortalité maternelle.
Maladies cardiovasculaires. Elles représentent 13,7% des morts maternelles entre 2013 et 2015 et deux tiers d’entre elles auraient pu être évitées, évalue l’enquête. Dans cette catégorie, on retrouve l’hypertension artérielle gravidique (cause directe) et les cardiomyopathies préexistantes, les cardiopathies valvulaires et ischémiques, etc. (causes indirectes). Pour les auteurs de l’enquête, ces chiffres montrent « l’importance de l’examen médical non strictement obstétrical de la femme enceinte ». Les difficultés respiratoires et les douleurs intenses dans la poitrine et le dos doivent être signalées au médecin car elles peuvent être le signe de maladies cardiaques.
Suicides. Jusqu’à présent, les suicides n’étaient pas inclus dans les décès classés comme morts maternelles*. On ne peut donc pas comparer les chiffres de la période 2013-2015 aux enquêtes précédentes. Ils représentent en tout cas 13,4% de ces décès (35 suicides) ; 91,3% de ces suicides auraient pu être évités, selon les auteurs de l’enquête. Comment ? En s’intéressant davantage à la santé mentale des futures et jeunes mamans, préconisent-ils. « Le recours au psychologue et/ou au psychiatre doit être systématique en cas de repérage de symptômes d’alerte » ; en cas de troubles psychiatriques connus ou découverts au cours de la grossesse, il faut « adapter le traitement avant la grossesse le cas échéant, suivre son respect et l’adapter au cours de la grossesse » et enfin « informer la patiente et son entourage que la période du post-partum est une période à risque de complication psychiatrique ».
Les facteurs de risque de mort maternelle. L’enquête s’est également intéressée aux facteurs augmentant les risques de mortalité maternelle. L’obésité et l’âge (à partir de 30 ans) multiplient le risque par deux (par quatre à partir de 40 ans). De fortes disparités existent également en fonction du contexte social (un quart des décès est survenu chez des femmes présentant au moins un critère de vulnérabilité) ; du pays de naissance (les femmes nées en Afrique sub-saharienne courent 2,5 plus de risque que celles nées en France) ; et du lieu de résidence (les DOM et l’Île-de-France sont les territoires les plus concernés par le risque de mortalité maternelle). Ces observations confirment celles des enquêtes précédentes.
* L’Organisation mondiale de la santé recommande de les prendre en compte depuis 2012.
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Source : Enquête nationale confidentielle sur les morts maternelles (ENCMM) 2013-2015, le 6 janvier 2021
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Ecrit par : Charlotte David - Edité par : Emmanuel Ducreuzet