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Environ une personne sur six dans le monde souffre d’infertilité, selon un rapport de l’OMS (2023). Ce problème de santé majeur affecte 17,8 % de la population adulte dans les pays riches et 16,5 % dans les pays à revenus faibles et intermédiaires. Depuis 1946, les hommes ont perdu plus de 50 % de leurs spermatozoïdes, et ce déclin s’aggrave depuis 2000, de -1,16 % à -2,64 % par an.
« Au sein d’un couple souffrant d’infertilité, la moitié des cas a principalement ou partiellement une origine masculine, rappelle la Pre Rachel Levy, et l’une des nombreuses causes de l’infertilité masculine est liée à une altération de la qualité du sperme. » L’environnement joue un rôle clé dans la fonction reproductive de l’homme, notamment les perturbateurs endocriniens, la nutrition, l’alcool, et d’autres facteurs comme l’obésité et le mode de vie qui peuvent également affecter la qualité du sperme.
Certaines études suggèrent qu’une alimentation saine, notamment le régime méditerranéen, peut améliorer la qualité des spermatozoïdes. Les aliments industriels et transformés, en particulier les viandes, les boissons sucrées et les aliments gras, ont en revanche un impact négatif.
L’une des explications est la suivante : les habitudes alimentaires – bonnes ou mauvaises -, les perturbateurs endocriniens et l’obésité laissent des « signatures épigénétiques » sur l’ADN des spermatozoïdes. Ces marques influencent l’expression des gènes, de manière positive ou négative.
Ainsi, les mécanismes impliqués dans la mauvaise qualité des spermatozoïdes incluent le stress oxydant, les déséquilibres hormonaux et l’inflammation.
L’étude française ALIFERT (2024) a permis d’identifier clairement les différents micronutriments et oligoéléments impliqués dans ces mécanismes, et de proposer un score de nutrifertilité pour le couple, la femme ou l’homme basé sur treize paramètres anthropométriques, métaboliques, et du statut anti-oxydatif. « Nous avons pu identifier des éléments clés tels que les vitamines A et E, le sélénium, le HDL cholestérol et l’hémoglobine glyquée, explique-t-elle. Et corréler le score ALIFERT à la fragmentation de l’ADN spermatique, associée à des taux de fécondation réduits, des fausses couches et des problèmes de santé chez les enfants. Ainsi, pour la première fois, nous avons une explication potentielle à cette fragmentation, sur laquelle nous pouvons agir. »
D’après les recommandations européennes en vigueur, il n’existe pas encore de données suffisamment robustes pour affirmer que les antioxydants sont efficaces dans le traitement de la fertilité masculine. « Il n’existe pas de consensus sur l’intérêt d’une supplémentation systématique en vitamines et en oligoéléments en cas d’infertilité masculine », conclut la spécialiste de la fertilité. Mais des études laissent entendre que nous serions sur la bonne piste. Les probiotiques montrent également des effets prometteurs sur les paramètres spermatiques.
Au centre de la fertilité, « nous collaborons avec des nutritionnistes et des diététiciens pour promouvoir un régime méditerranéen, indique la Pre Levy. La supplémentation en vitamines et oligo-éléments doit être encadrée par des professionnels de santé et basée sur des indications claires, comme une carence avérée ou un déséquilibre redox (déséquilibre entre la production de radicaux libres et les défenses antioxydantes de l’organisme, ndlr). »
Elle poursuit : « les compléments alimentaires tels que la vitamine C, la vitamine E, des oligoéléments comme le sélénium ou le zinc, des substances nutritionnelles comme la L-carnitine, le coenzyme Q10 ou des oméga-3 peuvent améliorer – ce qui a été montré dans des essais randomisés en double aveugle et contrôlés par placebo (le plus haut niveau de preuve, ndlr) – les paramètres spermatiques et la fragmentation de l’ADN spermatique. »
Tout en rappelant qu’il est crucial d’encadrer ces prescriptions pour éviter l’automédication.
Source : Suivi de la Journée Benjamin Delessert 2025. Pecora et al. How Food Choices Impact on Male Fertility Curr Nutr Rep. 2023 Dec; 12(4):864-876 ; Bachelot et al. 2024 Machine learning approach to assess the association between anthropometric, metabolic, and nutritional statu nd semen parameters Asian J Androl. 2024 Jul 1;26(4):349-355 ; Lameignère et al. Intérêt clinique d'une supplémentation alimentaire dans la prise en charge de l'homme infertile Médecine de la Reproduction 2020/1 Vol. 22.
Ecrit par : Hélène Joubert ; Édité par Emmanuel Ducreuzet