Papillomavirus : comment le tabac accroît le risque de cancer du col de l’utérus

23 janvier 2024

Les femmes qui fument sont davantage exposées aux HPV et au cancer du col de l’utérus que les non-fumeuses. Le tabac accroit en effet le risque d’être infecté et diminue les capacités d’élimination du virus par l’organisme. Explications.

Le tabac est responsable de phénomènes en cascade qui font le lit des risques liés aux papillomavirus (HPV). Dans les 4 500 composants chimiques qui se trouvent dans une cigarette, 60 sont cancérogènes, dont le benzopyrène qui augmente la charge virale, soit la quantité de virus. Et la nicotine, si elle n’est pas oncogène, agit sur la réponse immunitaire acquise et innée. S’agissant plus spécifiquement des femmes, les deux principaux facteurs de la survenue d’un cancer du col de l’utérus, sont une infection HPV et le tabac.

Concrètement, comment le tabac accroit-il les risques liés aux HPV, notamment chez les femmes ? Une étude de la NHANES, menée entre 2011 et 2016 sur 3 833 femmes fumeuses ou exposées au tabagisme passif, a montré que le tabac augmente de 32 % le risque d’une infection HPV. « Le risque grimpe à 70 % pour les fumeuses actives », ajoute Julia Maruani, gynécologue médicale à Marseille, lors d’une conférence de presse de la Société française de colposcopie et de pathologie cervico-vaginale.

Le virus moins rapidement éliminé

En cause ? La capacité de la nicotine à altérer les fonctions immunitaires. Immunité cellulaire, immunité humorale, immunité locale et immunité générale, « c’est l’ensemble de la fonction immunitaire qui est touchée », note la gynécologue. Outre la réponse immunitaire, « l’étude de la NHANES, publiée en novembre 2023, a montré que le tabac joue sur la réplication du HPV, sur les oncoprotéines qui permettent la survenue des lésions précancéreuses et sur les dommages de l’ADN », complète la spécialiste.

Le tabac agit également sur la clairance, capacité de l’organisme à éliminer une substance. En moyenne, les défenses immunitaires de l’organisme permettent d’éliminer un HPV dans les deux ans qui suivent la contamination, selon l’Institut Pasteur. Pour une personne qui fume, c’est beaucoup plus long, car la clairance diminue. « Les femmes fumeuses ont 50 % de probabilité en moins d’éliminer le virus », pointe Julia Muriani.

Arrêter de fumer pour diminuer les risques

Et puisque le virus n’est pas, ou moins rapidement, éliminé, l’organisme y est donc davantage exposé. « On sait que plus la persistance du virus est longue, plus on risque de développer des lésions précancéreuses responsables du cancer du col de l’utérus. » Quand on fume, on a plus de risques d’attraper un HPV et moins de chances de l’éliminer. « Et c’est proportionnel à la durée, à la fréquence et à la quantité fumée », résume la gynécologue.

Mais la clairance remonte dès lors que la personne arrête de fumer. « Face à une personne tabagique qui présente des lésions, il est donc important de pouvoir l’orienter vers une consultation de tabacologie », insiste la spécialiste, chiffre à l’appui. En effet, la majorité des personnes qui essaie d’arrêter de fumer reprend au bout d’une semaine et seulement 3 à 5 % des fumeurs qui arrêtent sont non-fumeurs après un an. Il est donc important d’être accompagné par un spécialiste pour mettre toutes les chances de succès de son côté.

Une autre étude dont la spécialiste se fait échos montre que le tabagisme est encore plus nocif quand on a commencé à fumer avant d’être exposé aux HPV. « Les personnes qui ont commencé présenteront encore plus de lésions ». En cela, une politique de prévention efficace contre le tabac auprès des plus jeunes, au collège et au lycée, apparaît également primordiale.

  • Source : Conférence de presse de la société française de colposcopie et de pathologie cervico-vaginale, janvier 2024

  • Ecrit par : Dorothée Duchemin – Edité par Emmanuel Ducreuzet

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