Fièvre hémorragique de Crimée-Congo : 6 questions sur ce virus transmis par la tique   

12 juin 2024

La fièvre hémorragique de Crimée-Congo (FHCC) est une maladie virale que peut transmettre la tique du genre Hyalomma marginatum, désormais présente en France sur le pourtour méditerranéen. Le virus a été détecté pour la première fois dans l’Hexagone en octobre 2023. En pleine saison d’activité des tiques, il est possible de prévenir leurs piqûres.

Maladie de Lyme, encéphalite à tique, mais aussi fièvre hémorragique de Crimée-Congo (FHCC). Le 24 octobre 2023, Santé publique France annonçait avoir détecté pour la première fois en France le virus de la FHCC chez des tiques de l’espèce hyalomma marginatum, prélevées sur des bovins. Le plus souvent asymptomatique ou paucisymptomatique (quasiment aucun symptôme), le virus peut parfois provoquer une fièvre hémorragique, avec un taux de létalité pouvant atteindre 40 %.

Si aucun cas humain n’a pour l’heure été enregistré en France, le risque de contamination est bien réel avec la présence de la tique dans l’ensemble du pourtour méditerranéen, la Corse (où elle est d’ailleurs implantée depuis les années 50), ainsi que l’Ardèche et la Drôme. Depuis 2013, 13 cas de FHCC autochtones ont été enregistrés en Espagne.

1 – Pourquoi ce nom de Crimée-Congo ?

« C’est en 1944, lors de l’avancée de l’Armée rouge, que cet agent pathogène a été identifié pour la première fois, en Crimée (région ukrainienne annexée en 2014 par la Russie). En 1969, lors d’une épidémie au Congo, les scientifiques se sont aperçus que le virus incriminé était le même que celui de 1944. L’association des deux noms a donné le terme de fièvre hémorragique Crimée-Congo », rembobine dans un article publié le 10 juin sur le site The Conversation, Simon Bessis, médecin infectiologue et chercheur à l’Institut Pasteur.

2 – Comment une tique est-elle infectée ?

La maladie, qui figure sur la liste des neufs agents pathogènes prioritaires établie par l’Organisation mondiale de la Santé, est endémique et circule de l’Asie à l’Afrique, en passant par l’Europe du Sud et de l’Est.

C’est dans ces zones que les tiques sont infectées, en se nourrissant du sang de leur hôte. Elles sont ensuite transportées par les oiseaux migrateurs qui les relâchent au-dessus des territoires survolés. Elles peuvent alors s’y implanter. « On pense aujourd’hui que les changements climatiques, qui accroissent les températures estivales, diminuent l’hygrométrie, et augmentent les températures minimales en hiver, facilitent de telles implantations », détaille infectiologue.

3 – Comment l’Homme est-il infecté ?

Les tiques adultes se nourrissent sur de grands mammifères, tandis qu’on retrouve les larves et les nymphes sur de petits vertébrés. Les tiques contaminées contaminent à leur tour l’hôte.

L’être humain est un hôte « accidentel » de la tique : il se retrouve parasité lorsqu’il pénètre dans les écosystèmes où vivent les hôtes habituels de Hyalomma. C’est à ce moment qu’il peut être contaminé. Le pic de contamination, qui correspond au pic d’activité de la tique, se situe entre avril et juillet en France. Une contamination est aussi possible par contact avec des animaux d’élevage. La transmission interhumaine existe également en cas de contact avec le sang ou les liquides organiques et parfois via les surfaces et matériaux contaminés.

4 – Quels sont les symptômes ?

Selon le chercheur, « environ 80 % des personnes infectées n’auront qu’une infection paucisymptomatique, se limitant à un tableau de symptômes pseudo-grippaux, voire asymptomatique (sans aucun symptôme). Les 20 % de patients infectés restant présentent en revanche des formes symptomatiques pouvant être sévères et nécessiter une hospitalisation ».

Dans cette forme symptomatique, on observe une phase d’environ une semaine avec des symptômes pseudo grippaux, peu spécifiques. Puis survient une phase hémorragique avec « divers symptômes tels que des saignements de nez (épistaxis), de petites taches rouges ou violacées sur la peau (pétéchies), des ecchymoses, des lésions hémorragiques de la peau et des muqueuses (purpura), des saignements des gencives (gingivorragies), des hémorragies sous-conjonctivales (la conjonctive est le tissu transparent qui recouvre le globe oculaire et la face interne des paupières), la présence de sang dans les urines (hématurie) ou dans les vomissements (hématémèse) ».

La convalescence dure 10 à 20 jours avec une grande fatigue, des pertes de cheveux, des troubles de la mémoire et/ou de l’attention, des troubles psychiques, une tachycardie…

Le diagnostic est posé au moyen d’un test PCR et transmis au Centre national de référence. Les échantillons sont manipulés dans les laboratoires dédiés à haut confinement biologique NSB4 (niveau de sécurité biologique 4) dédié à l’étude des agents infectieux hautement pathogènes.

5- Quel prise en charge ?

Le patient est isolé dans un lieu spécialisé, « avec des équipes formées à ce genre de pathologie capable de réaliser des soins visant à traiter les symptômes (hydratation, transfusion) ».

Il n’existe pas de médicament curatif clairement validé selon Simon Bessis. Aucun vaccin n’est non plus validé par les instances sanitaires internationales. Plusieurs projets sont néanmoins à l’étude.

6 – Comment se protéger de la piqûre de tique ?

Au printemps et en été, la tique est présente dans les zones sèches de garrigues et de maquis, pâtures, chemins de randonnée, champ, cultures, vergers, vignes, etc. Il convient de porter des vêtements couvrant les bras et les jambes et des chaussures fermées, d’inspecter son corps et celui des enfants de retour de promenade et de procéder au retrait le plus rapide possible de la tique, le cas échéant, à l’aide d’un tire-tique ou d’une pince fine.  Après l’avoir retirée, désinfectez et photographiez la tique si possible.

La durée moyenne d’incubation court de 2 à 14 jours (5 jours en moyenne). Si l’un des symptômes se manifeste dans les deux semaines qui suivent la piqûre, consultez un médecin.

  • Source : The conversation, 11 juin 2024 – Santé publique France

  • Ecrit par : Dorothée Duchemin – Edité par Emmanuel Ducreuzet

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