Binôme aidant-aidé, comment bien se comprendre ?

09 décembre 2024

On idéalise souvent la relation entre une personne malade, âgée ou fragile et son proche aidant. Au quotidien, les écarts entre les ressentis et les attentes des deux parties existent. Et alors que la relation entre l’aidant et l’aidé évolue en fonction de l’état physique et psychologique de chacun, des difficultés de communication peuvent s’installer. En prendre conscience, c’est déjà un premier pas.

Chaque « couple » aidant-aidé possède ses spécificités et cela se traduit en matière de communication, avec parfois des difficultés relationnelles. La personne aidée en perte d’autonomie doit faire avec ce dont elle dispose, et souvent du fait de sa pathologie, avec une capacité d’expression qui peut évoluer. L’aidant doit donc sans cesse ajuster son niveau de communication pour que la relation d’aide soit la plus équilibrée possible.

Des sentiments, opinions, parfois discordants

L’enquête 2024 de Santé respiratoire France parue le 22 novembre dernier dresse un état des lieux de la relation d’aidance dans le contexte des maladies respiratoires chroniques, où 60 % des aidants se déclarent en souffrance, dont 12 % en détresse sévère. L’enquête pointe des divergences de perception : 22 % des aidants estiment que leur proche est autonome, contre 30 % des malades qui se considèrent eux-mêmes totalement autonomes. De plus, les malades ont tendance à sous-estimer l’importance du soutien moral fourni par leurs aidants.

Les proches aidants signalent des difficultés plus importantes que celles perçues par les malades. Par exemple, 83 % des aidants et 62 % des malades identifient l’anxiété face à l’avenir de la personne aidée comme le principal défi. Les aidants apparaissent non seulement plus conscients des obstacles à venir, mais expriment également une fatigue accumulée et un sentiment de manque de reconnaissance. À ce sujet, 73 % des aidants et seuls 47 % des malades considèrent que la fatigue physique et morale de l’aidant représente la deuxième difficulté majeure. Enfin, 42 % des aidants, contre seulement 14 % des malades, dénoncent un manque de reconnaissance des aidants de la part de la société, de l’entourage et des pouvoirs publics !

Cependant, 72 % des personnes aidées éprouvent de la culpabilité envers leur proche aidant, tandis que 45 % expriment de l’inquiétude et de l’anxiété concernant son avenir. D’où l’importance d’une bonne communication au sein du binôme aidant/aidé.

Améliorer la relation aidant-aidé, a fortiori en situation de crise

Être aidant et savoir adopter la meilleure attitude envers son proche fragilisé peut s’avérer complexe. Les experts du Collectif Je t’aide expliquent qu’il est essentiel, dans la mesure du possible, de rassurer son proche en privilégiant une posture d’observation et d’écoute attentive à ses besoins spécifiques. Cela implique de comprendre ce qui déclenche son angoisse : quelle situation, quel comportement ou quels mots ont suscité une réaction particulière ? Cette approche permet de mieux adapter son accompagnement et de répondre de manière appropriée aux attentes de son proche.

Se poser ce type de questions favorise une compréhension plus large des besoins du proche aidé et permet d’éviter un écueil fréquent : imposer des solutions jugées adéquates pour soi, sans tenir compte de ce qui est réellement pertinent pour l’autre. Si cette posture de recul émotionnel est idéale en théorie, elle reste difficile à maintenir dans des situations particulièrement critiques. S’adresser à des professionnels peut aider à prendre la distance nécessaire et à identifier des solutions adaptées. Pourtant, de nombreux aidants restent isolés et ne sollicitent pas l’aide dont ils auraient besoin. Des associations proposent des lignes d’écoute gratuites, conçues pour accompagner et orienter les aidants dans leur rôle.

Poser des questions ouvertes, écouter…

La clé pour apaiser les tensions réside dans la recherche d’une compréhension mutuelle. Plutôt que de se fier à des interprétations, il est préférable d’oser poser des questions ouvertes à l’autre. Cette démarche favorise un dialogue constructif, permettant à chacun d’exprimer ses ressentis et de mieux comprendre ceux de l’autre. En adoptant cette approche, la qualité des relations s’en trouve considérablement améliorée.

Si questionner est important, écouter est tout aussi primordial. Cela semble être une chose simple et naturelle mais requiert en réalité des qualités spécifiques. L’habitude, la lassitude conduisent parfois l’aidant à ne plus vraiment être dans une qualité d’écoute suffisante pour que la communication soit fluide et partagée, fait remarquer Annie Ludinard, coordinatrice aide aux aidants et spécialisée en gérontologie, sur « Aidons les nôtres », le portail communautaire dédié aux aidants.

L’expérience démontre que l’écoute est souvent plus attentive lorsque l’on se sent capable de répondre. « En revanche, lorsqu’on ne sait plus quoi dire ni comment agir, l’écoute tend à devenir stéréotypée », analyse Annie Ludinard, influencée par une sélection inconsciente de ce que l’on est encore prêt à entendre ou capable de comprendre.

« Je ne le comprends plus… », « Nous n’arrivons pas à échanger » …

La perte d’autonomie transforme souvent les relations, menant à des incompréhensions où l’échange entre l’aidant et l’aidé se réduit à des monologues. Pour éviter cela, l’aidant doit ajuster son mode de communication en fonction de l’aidé, peut-on lire sur le site Je suis aidant, qui liste quelques conseils pour améliorer la communication :

  • Ne soyez pas pressé de finir ses phrases ;
  • Ne l’interrompez pas sous prétexte que ses propos semblent confus ou incohérents ;
  • Accordez du temps à la conversation, sans chercher à ne la précipiter ni à la contraindre ;
  • Si vous ne comprenez pas, demandez-lui de répéter et reformulez pour clarifier ;
  • N’ayez pas peur de reconnaître que vous n’avez pas compris, la clarification est toujours préférable à une mauvaise interprétation ;
  • Vos proches peuvent vous apporter leur aide, mais n’oubliez pas de leur rappeler que ces conseils sont également pour eux.

De plus, lorsque les mots se font rares, la communication non verbale prend une importance accrue. Le regard, les gestes, les postures, les attitudes et le toucher deviennent des moyens puissants d’expression pour ceux qui savent les utiliser.

  • Source : Enquête 2024 (1ᵉʳ juillet au 30 septembre 2024) « Quelle place et quel rôle occupent les aidants auprès des personnes atteintes de maladies respiratoires ? » par Agence Smartketing (questionnaires auto-administrés) ; Article expert du Collectif je t’aide, réalisé avec Maëlle Chevallier , coordinatrice des bénévoles de l’association Avec Nos Proches, Alexandra Parois, responsable du pôle psychologique et Julie Lorieau, psychologue chez RMA (Ressources Mutuelles Assistance) ; Communication aidant/aidé : comment se comprendre ? par Annie Ludinard (Aidons les nôtres).

  • Ecrit par : Hélène Joubert - Edité par Emmanuel Ducreuzet

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