Burn out : comment prévenir la rechute ?
29 mai 2024
Les chiffres illustrent à la fois le caractère courant et la complexité à définir le phénomène : selon les études, entre 300 000 et 2,5 millions de Français seraient concernés par une situation de burn out. Soit, une véritable épidémie, avec un enjeu central de prise en charge et de prévention de la rechute.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) caractérise le burn out « comme un sentiment de fatigue intense, de perte de contrôle et d’incapacité à aboutir à des résultats concrets au travail ». De son côté, la Haute Autorité de Santé (HAS), définit un « épuisement physique, émotionnel et mental qui résulte d’un investissement prolongé dans des situations de travail exigeantes sur le plan émotionnel ».
Stop !
En présence d’un syndrome d’épuisement professionnel, l’objectif est d’appuyer sur le bouton ‘Pause. ’ « Le meilleur médicament reste l’arrêt de travail et donc le repos », précise le Dr Patrick Lemoine, psychiatre, auteur de A quoi servent les symptômes ? (Odile Jacob Editeur). Autrement dit, de s’éloigner du contexte socioprofessionnel à l’origine du problème.
Sevrage médicamenteux ?
Selon la HAS, « le traitement du trouble peut comporter une prise en charge non médicamenteuse fondée sur des interventions psychothérapeutiques ou psychocorporelles », réalisées par un professionnel de santé ou un psychologue formé à ces techniques. Le Dr Lemoine abonde et évoque même une forme de « sevrage médicamenteux », car à l’image des « neuroleptiques et autres tranquillisants », bon nombre de molécules « tendent à masquer la réalité de la souffrance et la maladie ». Les antidépresseurs ? Le psychiatre se montre plus nuancé : « ils sont efficaces sur les troubles anxieux et sur les dépressions sévères », insiste-t-il. « Ils doivent être administrés si possible pas trop longtemps et à des doses pas trop importantes ».
Identifier et supprimer la cause
Au-delà du repos, la prise en charge doit aussi et surtout être propice à « aider le patient à identifier ce qui a déclenché son burn out et ensuite à traiter cette cause », poursuit-il. Illustration : « s’il a pris sur son temps de sommeil pour faire face à des tâches qu’il considère comme immenses, nous réalisons avec lui un agenda de sommeil et d’éveil. S’il a subi des humiliations répétées, nous basculons dans une partie juridique en lien avec un juriste du travail. Et pour digérer le traumatisme représenté par ces humiliations, nous pouvons effectuer des séances d’EMDR* ».
Si des problématiques d’organisation du travail ressortent, « il convient notamment d’apprendre à fragmenter le travail, à savoir repérer des moments-clés de la journée où nous sommes le plus efficaces ». Mais le psychiatre ne nie pas que dans certains cas, « à l’image de personnes qui travaillent dans des entrepôts logistiques, avec des horaires complexes, il peut être difficile d’intervenir. Car nous nous heurtons aussi à une réalité socio-économique… » Et de prévenir : « si la personne revient au travail sans que la cause de son burn out ait été supprimée, il existe un fort risque de rechute… »
* « Cette approche thérapeutique vise à traiter les conséquences d’un traumatisme psychique en combinant un rappel mental par le patient du souvenir traumatique et des stimulations sensorielles bilatérales alternées (avec des mouvements oculaires induits, par exemple en demandant au patient de suivre le mouvement des doigts du thérapeute ou encore des stimulations alternées tactiles sur les genoux, ou des stimulations auditives). Les mouvements oculaires pratiqués de cette manière doivent permettre la remise en route d’une gestion naturelle des souvenirs douloureux et la restauration de l’estime de soi », selon la définition de l’Inserm.
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Source : Interview du Dr Patrick Lemoine, 24 mai 2024 – Haute Autorité de Santé, site consulté le 27 mai 2024 – Assemble nationale, Rapport d’information de la commission des affaires sociales, 15 février 2017
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Ecrit par : David Picot – Edité par : Emmanuel Ducreuzet