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Le cancer du sein hormonodépendant est le cancer du sein le plus fréquent – 80 % des cancers du sein diagnostiqués. Il est aussi celui qui présente le meilleur pronostic. Cependant, au stade métastatique – lorsque les cellules cancéreuses ont migré à distance de la zone de cancer initiale – il devient résistant au traitement standard, une hormonothérapie qui bloque l’activation du récepteur aux œstrogènes en même qu’il inhibe la prolifération des cellules. Cette résistance survient dans près de 40 % des cas. Elle s’explique le plus souvent par des mutations du gène récepteur aux œstrogènes ESR1 qui entraînent une résistance à l’hormonothérapie.
Ces mutations peuvent être détectées des mois avant la réactivation du cancer grâce à une biopsie liquide ; une prise de sang permettant d’identifier l’ADN tumoral circulant. Le détecter précocement permettrait alors de cibler les mutations responsables de la résistance grâce au SERD, famille de molécules d’hormonothérapie, des inhibiteurs sélectifs des récepteurs aux œstrogènes. Famille qui s’est récemment enrichie de nouvelles molécules plus efficaces dont le camizestrant (AstraZeneca).
Un vaste essai clinique international de phase 3, dont les résultats ont été présentés dimanche 1er juin à l’American society of clinical oncology (Asco) et publiés dans The New england journal of Medicine, a surveillé 3 000 patientes présentant un cancer du sein métastatique hormonodépendant. Toutes suivaient le traitement standard et subissaient tous les deux à trois mois, une prise de sang visant à détecter une mutation résistante.
Les 315 patientes qui ont présenté cette mutation ont été réparties en deux groupes : le premier a continué à recevoir le traitement standard, le second a reçu le camizestrant combiné à l’inhibiteur de la prolifération cellulaire. L’hormonothérapie orale a été changée dès les premiers signes de mutations génétiques dans le sang.
« Les patientes recevant le camizestrant ont vu leur risque d’évolution du cancer diminuer de 56 %, repoussant d’environ 6 mois en moyenne le temps jusqu’à première ré-évolution. A 12 mois, le taux de survie sans progression était de 60,7 % pour les patientes ayant reçu du camizestrant contre 33,4 % chez les autres. A 24 mois, la survie sans progression atteignait 29,7 % contre 5,4 % », décrit l’Institut Curie, dans un communiqué de presse. Autre avantage, la qualité de vie était également améliorée : les patientes sous traitement standard ont vu leur qualité de vie décliner dès 6 mois après l’apparition des mutations, contre 23 mois en moyenne chez les patientes ayant changé de traitement.
« Dix ans se seront écoulés entre la mise au point au laboratoire d’un test sanguin détectant les mutations de résistance et les résultats de l’étude SERENA-6. Si l’étude PADA-1, que nous avions menée en France grâce au réseau Unicancer, avait établi la preuve de concept, SERENA-6 grave dans le marbre que notre stratégie d’interception des résistances, grâce à un suivi régulier non invasif par prise de sang et un changement de traitement, mène à un bénéfice tangible pour la survie et la qualité de vie des patientes », s’enthousiasme le Pr François-Clément Bidard, oncologue médical à l’IHU Institut des Cancers des Femmes de l’Institut Curie, Professeur à l’Université de Versailles-Saint-Quentin et co-pilote de l’étude SERENA-6. « Ces résultats très positifs valident le potentiel de notre approche d’interception par la détection de mutations dans l’ADN tumoral circulant. Désormais, les perspectives de recherche et clinique sont fascinantes, cette stratégie pouvant potentiellement s’extrapoler dans d’autres situations et types de cancers, et mener à l’enregistrement de nouveaux médicaments. »
Source : Institut Curie, The New england Journal of Medicine
Ecrit par : Dorothée Duchemin – Edité par Emmanuel Ducreuzet