Covid-19, grippe, VRS, mycoplasma pneumoniae : faut-il craindre une quadruple épidémie ?
08 décembre 2023
Dans son bulletin hebdomadaire, Santé Publique France observe une hausse des suspicions de Covid-19 dans les actes de SOS Médecins et aux urgences. En cause, l’émergence de JN.1 qui pourrait être à l’origine d’une nouvelle vague épidémique. Le point avec le Dr. Benjamin Davido, infectiologue à l’hôpital Raymond-Poincaré, à Garches (Hauts-de-Seine)
A l’approche des fêtes de fin d’année, les indicateurs sont au rouge. Selon le dernier bulletin d’information de Santé publique France, les suspicions d’infections au Covid-19 sont en hausse de 28 % chez les adultes, de 19 % chez les moins de 15 ans dans le réseau SOS Médecins. Aux urgences, la courbe suit la même tendance. La faute à JN.1, un sous-variant de BA.2.86, celui qui avait été surnommé Pirola à la fin de l’été. « Le JN.1 représente actuellement 50 % des séquençages alors qu’il était encore minoritaire il y a quelques semaines (10 % des séquences interprétables le 23 octobre, contre la 5 % la semaine précédente, ndlr). Et on sait aujourd’hui que les vagues épidémiques sont très souvent associées à l’émergence de nouveaux variants », explique le Dr. Benjamin Davido, infectiologue à l’hôpital Raymond-Poincaré, à Garches (Hauts-de-Seine).
JN.1, un sous-variant très contagieux
Alors que l’hiver est bien installé, que la nuit tombe tôt et que les activités se déroulent principalement dans des intérieurs peu ou pas aérés, faut-il craindre JN.1 ? « Il présente un nombre important de mutations. A l’image de l’apparition d’Omicron, cela faisait un moment qu’on n’avait pas connu un sous-variant avec autant de modifications structurelles qui lui apportent d’excellentes qualités de compétiteur pour échapper au système immunitaire. Il a donc tout ce qu’il faut pour être extrêmement contagieux », développe l’infectiologue. On peut ainsi s’attendre à une hausse des cas continus ces prochaines semaines. Et si JN.1 ne semble pas, à ce stade, plus grave que ses cousins, le fait qu’il soit très contagieux devrait, mathématiquement, faire grimper le nombre de personnes contaminées de même que le nombre de patients dont l’état nécessite une hospitalisation. A noter toutefois que malgré cet échappement immunitaire, l’efficacité vaccinale semble conservée contre les formes sévères.
Le retour des pertes de goût et d’odorat
Quant aux symptômes, « à l’image de son aîné BA.2.86, JN .1 est réputé pour causer des conjonctivites chez l’enfant. C’est aussi le retour de la perte du goût et de l’odorat, l’agueusie et l’anosmie, comme on l’a connu en 2020 et dans une moindre mesure en 2021 avec les variants initiaux », détaille le Dr. Davido. Les autres symptômes connus sont une grande fatigue, la toux, la fièvre, un écoulement nasal, des céphalées, des maux de gorge, une diarrhée, un essoufflement, des nausées et vomissements et un rhume.
« On porte un masque si on est malade »
La situation n’est pas comparable à celle de 2020 et 2021 sur le plan du Covid-19. Mais cette saison – et ce fut déjà le cas en 2022-2023 – le Covid-19 va coexister avec les autres virus hivernaux. L’épidémie de virus syncytial (responsable de la bronchiolite) est en cours et le virus de la grippe est déjà en phase pré-épidémique. L’année dernière, le système de soins avait été secoué par une triple épidémie. Cette année vient en outre s’ajouter celui qu’on n’attendait pas, le mycoplasma pneumoniae, une bactérie responsable de pneumopathies chez les moins de 15 ans. Dans son bulletin de surveillance hebdomadaire du 6 décembre, Santé publique France observait « une poursuite de l’augmentation des passages aux urgences et actes pour pneumopathies, chez les moins de 15 ans (respectivement +25 % et +36 %) et chez les plus de 15 ans (+16 % et + 23 %), toujours dans des niveaux très supérieurs aux années précédentes ».
Dans ce contexte, faut-il cette année s’attendre à une quadruple épidémie ? « La situation actuelle ne présage rien de bon… ». Benjamin Davido, inquiet d’une déstabilisation du système de soins dans les prochaines semaines regrette un manque d’informations et de sensibilisation concernant les gestes barrières et la vaccination. « La promotion des gestes barrières a totalement disparu. Pourtant, ils sont universels face à l’ensemble des agents infectieux, les trois virus et la bactérie ». Quant à la vaccination, elle s’élève à seulement 23 % dans la population ciblée. « C’est maintenant qu’il faut se protéger, pas la veille de Noël. On porte un masque si on est malade et on se fait tester ! », conclut l’infectiologue.
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Source : Santé publique France, Interview de l’infectiologue Benjamin Davido
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Ecrit par : Dorothée Duchemin – Edité par Emmanuel Ducreuzet