Dépistage du cancer du col de l’utérus : bientôt le recours à l’auto-prélèvement

19 janvier 2024

Le dépistage national du cancer du col de l’utérus, imputable dans près de 100 % des cas à une infection à papillomavirus (HPV), s’adresse à toutes les femmes âgées de 25 à 65 ans. Mais, alors que seules 60 % des femmes se font dépister, comment atteindre les 40 % de femmes restantes ? Pour répondre à cet enjeu de santé publique, l’auto-prélèvement sera prochainement intégré aux camagnes de dépistage. 

Chaque année en France, 3 000 femmes développent un cancer du col de l’utérus et près de 1 000 en meurent. Pour réduire l’incidence de ce cancer, quatrième cancer le plus fréquent chez la femme dans le monde, un dépistage organisé du cancer du col de l’utérus est proposé aux femmes de 25 à 65 ans. Celui-ci vise à augmenter la couverture de dépistage pour atteindre 80 % des femmes et diminuer de 30 % l’incidence et la mortalité du cancer du col de l’utérus. Pourtant, toujours 40 % des femmes ciblées ne se font pas dépister. Les raisons sont diverses : éloignement des soins, crainte du médecin, pudeur…

Comment réussir à atteindre ces femmes ? L’auto-prélèvement pourrait constituer une partie de la réponse. « On sait aujourd’hui grâce à différentes études, que l’auto-prélèvement permet d’atteindre des femmes qui ne se font pas dépister. La patiente gère elle-même son prélèvement et elle n’est pas soumise à l’examen d’un professionnel de santé », confirme le Pr.  Xavier Carcopino, président de la Société française de colposcopie et de pathologie cervico-vaginale (SFCPCV). « Lorsqu’on propose ce test, on augmente la couverture du dépistage. »

Pour les femmes à partir de 30 ans

Ainsi, selon les recommandations de la HAS en 2021, confirmées en 2022 par l’Institut national du cancer (INCA) dans son référentiel national, « l’auto-prélèvement vaginal doit être proposé, à partir de 30 ans, aux femmes non dépistées ou insuffisamment dépistées. Il s’agit d’une modalité alternative au prélèvement réalisé par un clinicien ».

Concrètement, comment le dispositif sera mis en place (dans les prochains mois, selon la SFCPCV) ? Un kit d’auto-prélèvement sera adressé aux femmes à partir de 30 ans par les centres régionaux de coordinations des dépistages, 12 mois après le premier courrier d’invitation. Si la patiente est éligible, le professionnel de santé qui la suit pourra aussi faire une demande pour sa patiente. Elle recevra le kit avec un courrier d’accompagnement.

Le mode d’emploi est simple. Il s’agit d’un écouvillon, une sorte de grand coton-tige, à introduire dans le vagin. Il faut ensuite le tourner trois fois en touchant les parois. Puis remettre le coton-tige dans le tube à insérer dans une pochette plastique dument étiquetée et à poster rapidement au laboratoire, avec la fiche d’identification. « On sait que la sensibilité de ces tests est, grosso modo, la même que les tests réalisés par les professionnels de santé », affirme le Pr. Carcopino.

Un test HPV, mais pas un examen cytologique

La limite de l’auto-prélèvement ? « Ce test ne permet pas de faire la cytologie, ce qu’on appelait avant le frottis soit l’examen de cellules du col en desquamation, visant à identifier, ou non, des cellules anormales. L’auto-prélèvement permet de récupérer des sécrétions vaginales mais ne permet pas un prélèvement sur le col », explique le président de la SFCPCV. Ainsi cet auto-prélèvement permet uniquement la réalisation d’un test HPV, les papillomavirus étant à l’origine de près de 100 % des cancers du col de l’utérus.

Lors d’un prélèvement réalisé par un professionnel de santé, si le test HPV est positif, le laboratoire réalise l’examen cytologique à partir du même prélèvement. Avec l’auto-prélèvement, ce n’est pas possible. Si le test est positif aux HPV, il faudra que la patiente voie un professionnel de santé pour effectuer un prélèvement afin de réaliser l’examen cytologique. Ces femmes qui justement ne participent pas au dépistage prendront-elles rendez-vous pour un prélèvement ? « Selon nos études, on est globalement en dessous des 50 % des patientes qui vont consulter après un test HPV positif. Mais cela reste malgré tout un bon moyen d’identifier les populations et d’aller ensuite les chercher », note Xavier Carcopino. Utile, en outre, pour les femmes qui accepteront de consulter. Si le test est négatif, la patiente n’a rien à faire durant les cinq années qui suivent.

Autre limite selon le spécialiste : « si le test est positif, ces femmes ne bénéficient pas de l’information d’un professionnel alors qu’on sait que l’annonce d’un test positif est source d’une grande angoisse ».

A noter : l’auto-prélèvement n’est pas proposé aux femmes avant 30 ans « car la possibilité que celui-ci soit positif aux HPV est trop importante », précise le Pr. Carcopino. C’est aussi pour cette raison que le dépistage organisé est réalisé par examen cytologique chez les femmes de 25 à 29 ans (deux examens à un an d’intervalle puis 3 ans après, si les résultats sont normaux). A partir de 30 ans, le dépistage consiste en un test HPV, tous les 5 ans, visant donc à détecter les virus HPV à haut risque.

  • Source : Référence national, dépistage du cancer du col de l’utérus, cadre et modalités de recours aux auto-prélèvements vaginaux, Inca – Conférence de presse de la Société Française de Colposcopie et de Pathologie Cervico-Vaginale, 11 janvier – Santé publique France – Ameli.fr.

  • Ecrit par : Dorothée Duchemin – Edité par Emmanuel Ducreuzet

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