Ecrans et retards de développement : la durée d’exposition, pas la seule coupable

14 septembre 2023

Une étude de l’Inserm relativise l’importance du temps d’exposition aux écrans sur le développement des enfants. Elle pointe les contextes d’utilisation de ces écrans qui pourraient être plus significatifs que la durée.

Le temps d’exposition n’est pas le seul facteur à prendre en compte pour mesurer l’impact des écrans sur le développement cognitif des enfants. Selon une étude du Centre de recherche en épidémiologie et statistiques (Inserm/INRAE/Université Paris Cité/Université Sorbonne Paris Nord), dont les résultats ont été publiés récemment dans The Journal of child psychology and Psychiatry, le temps d’écran a évidemment son importance, mais également le contexte d’exposition.

Les habitudes de vie prises en compte

Ces travaux sont basés sur les données de près de 14 000 enfants, collectées de leurs 2 ans à leurs 5 ans et demi entre 2013 et 2017. L’équipe scientifique « a cherché à évaluer les associations entre utilisation d’écran et développement cognitif dans la petite enfance, en prenant en compte les facteurs liés au contexte social, périnatal, familial et aux habitudes de vie », note l’Inserm dans un communiqué du 13 septembre.

Temps d’écran quotidien, télévision allumée ou non durant les repas, habitudes de vie, activités quotidiennes des enfants ont été renseignés par les parents. A partir de ces informations, les chercheurs ont évalué le développement du langage à 2 ans, le raisonnement non verbal à 3,5 ans et le développement cognitif global à 3,5 et 5,5 ans.

Si le temps d’exposition aux écrans était effectivement associé à de moins bons scores de développement cognitif global (motricité fine, langage, autonomie), « la relation négative se réduisait et devenait de faible magnitude » en prenant en compte tous les autres facteurs relatifs aux modes de vie de l’enfant. Facteurs qui eux aussi influencent positivement ou négativement le développement cognitif des bambins.

Les effets délétères de la télévision à table

Pour illustrer son propos, l’Inserm pointe spécifiquement le fait d’avoir la télévision allumée durant les repas en famille dès l’âge de 2 ans, habitude qui concerne 41 % des enfants. Ce comportement était associé à de moins bons scores de développement du langage à 2 ans et un moins bon développement cognitif à 3 ans et demi. « Cela pourrait s’expliquer par le fait que la télévision, en captant l’attention des membres de la famille, interfère avec la qualité et la quantité des interactions entre les parents et l’enfant. Or, celle-ci est cruciale à cet âge pour l’acquisition du langage », explique Shuai Yang, doctorant et premier auteur de l’étude. Il poursuit : « la télévision ajoute un fond sonore qui, lorsqu’il se superpose aux discussions familiales, va rendre difficile le déchiffrage des sons pour l’enfant et limiter la compréhension et l’expression verbales. »

L’étude ne remet pas en question l’importance de la durée d’exposition aux écrans – « lorsqu’un enfant utilise un écran excessivement, il le fait au détriment d’autres activités ou interactions sociales essentielles pour son développement », précise Jonathan Bernard, qui a dirigé l’étude. Mais elle souligne le fait que le contexte d’utilisation de l’écran ainsi que les habitudes de vie de l’enfant jouent également un rôle important.

  • Source : Communiqué de presse de l’inserm (13 setpembre 2023) - Associations of screen use with cognitive development in early childhood: the ELFE birth cohort, The Journal of child psychology and psychiatry, 29 août 2023

  • Ecrit par : Dorothée Duchemin – Edité par Emmanuel Ducreuzet

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