Faut-il avoir peur des édulcorants ?

17 octobre 2014

Voilà un débat qui peine à être tranché. Les édulcorants – ces additifs alimentaires au fort pouvoir sucrant – représentent-ils un risque pour notre santé ? Ici et là sont menées différentes études sur le sujet. Et les conclusions s’opposent bien souvent. La Conférence de la Fédération européenne des Associations de Diététiciens (EFAD), qui s’est tenue à Athènes du 9 au 12 octobre, a permis à certains spécialistes de prendre la défense de ces produits « souvent bien utiles aux patients ». 

Aspartame, stévia, sucralose… les « édulcorants intenses » sont des additifs alimentaires utilisés pour donner une saveur sucrée aux aliments. Problème, on ne sait pas grand-chose de leurs effets à long terme sur notre santé. Pour France Bellisle, chercheur à l’Unité d’Epidémiologie Nutritionnelle, Université Paris 13, « ces produits ont souvent été accusés de tous les maux. En premier lieu en ce qui concerne le poids. Ils seraient addictifs, déclencheraient la faim, nous feraient manger davantage et donc contribueraient au surpoids ! Pourtant, l’abondante littérature collectée depuis 40 ans montre que les édulcorants pourraient être bénéfiques auprès des consommateurs soucieux de leur poids ».

Présent lors de cette intervention, le Pr James Hill, spécialiste de l’obésité à l’Université du Colorado (Etats-Unis) ne peut qu’abonder dans ce sens. Au cours d’une étude publiée en juillet dernier, il avait comparé directement les effets des édulcorants basses calories avec ceux de l’eau sur la perte de poids. Résultats, plutôt surprenants convenons-en, sur 12 semaines, les sujets du groupe « boissons édulcorées » avaient perdu significativement plus de poids (5,95 kg) que ceux du groupe « eau » (4,09 kg).

Alors comment expliquer ces résultats ? Avant tout, chacun des participants était soumis à 300 minutes d’activité physique par semaine ! Et s’il peine à donner une explication, le Pr Hill constate que « la sensation de faim était significativement plus faible dans le 1er groupe. Les produits (à base d’édulcorants) permettraient de rendre la discipline alimentaire moins contraignante.»

Conflits de spécialistes

Pourtant, dans l’assemblée une voix se fait entendre. « Que penser des études qui démontrent le rôle des édulcorants dans la survenue de certains cancers, du diabète ou encore de l’épilepsie ? » s’interroge une étudiante. « Ne confondons pas science et émotion », répond le Pr Hill. « Parfois certains travaux – le plus souvent réalisés sur des rongeurs et non chez l’Homme – viennent condamner tel ou tel édulcorant. Mais c’est occulter les dizaines d’études qui, au contraire, ont fait état de leur innocuité. »

Pourtant, en 2013, des chercheurs français de l’INSERM avaient réalisé une étude auprès de 66 000 femmes. Et à la question « la consommation régulière de boissons ‘light’ est-elle associée à un risque de développer un diabète de type 2 ? », leur réponse prenait la forme d’un grand « OUI ». Un travail qui, à l’époque allait à l’encontre des résultats d’une enquête menée par l’Association française des Diabétiques (AFD).

Dans la capitale grecque, ce 11 octobre, Aimilia Papakonstantinou, conférencière au Département des sciences des aliments de l’Université d’Athènes, s’est ralliée davantage à l’avis de l’AFD. « Les édulcorants sont importants pour ceux qui contrôlent leur glycémie. Cela leur permet de ne pas sacrifier le goût sucré. Les diététiciens devraient s’en servir pour aider leurs patients, notamment dans la gestion de leur diabète ! »

Vous l’aurez compris, le débat entre les pro et les anti édulcorants est loin de s’achever. Quoi qu’il en soit, en décembre dernier, l’Autorité européenne de Sécurité des Aliments (EFSA) rendait un avis sur ces « faux sucres ». Elle y confirmait alors la sécurité pour la santé humaine de ces additifs. 

  • Source : De notre envoyé spécial à l’EFAD, Athènes, 9 -12 octobre 2014

Aller à la barre d’outils