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L’exposition à la pollution atmosphérique, notamment liée au trafic routier, accroît-elle le risque de leucémie aiguë chez l’enfant ? C’est la question que s’est posée une équipe de l’Inserm, en collaboration avec l’Université Sorbonne Paris Nord, l’Université Paris Cité et l’INRAE, alors que le rôle de polluants dans l’air est reconnu dans certains cancers chez l’adulte. Leurs résultats ont été publiés le 22 octobre dans la revue Environmental Health.
La leucémie aiguë est le cancer le plus fréquent chez l’enfant de moins de 15 ans. Ce cancer pédiatrique se caractérise par la prolifération anormale et incontrôlée de cellules hématopoïétiques immatures dans la moelle osseuse – organe à l’origine de toutes les cellules sanguines. Ces cellules immatures prennent progressivement la place de cellules fonctionnelles du sang. Les deux types principaux de leucémie chez l’enfant sont la leucémie aiguë lymphoblastique (LAL), qui concerne la lignée lymphoïde et représente 80 % des cas, et la leucémie aiguë myéloïde (LAM), qui concerne la lignée cellulaire myéloïde et représente 15 % des cas.
L’étude s’est appuyée sur les données du registre national des cancers de l’enfant : 581 enfants atteints de LAL et 136 atteints de LAM, nés et diagnostiqués entre 2010 et 2015, avec un groupe témoin de près de 12 000 enfants nés sur cette même période.
Les indicateurs d’exposition impliquaient la proximité d’un axe routier à fort trafic (moins de 500 m) et des modélisations d’exposition à plusieurs polluants liés au trafic : dioxyde d’azote (NO2), particules fines PM2,5 et carbone suie. Les zones de résidence des enfants à la naissance ont été classées en trois groupes d’unité urbaine : moins de 5 000 habitants, entre 5 000 et 99 999 habitants et de 100 000 habitants et plus.
Les enfants les plus exposés aux PM2,5 présenteraient un risque plus élevé de l’ordre de 70 % par rapport aux enfants les moins exposés et chaque augmentation de 2 μg/m3 de la concentration en PM2,5 dans l’air serait associée à une hausse du risque moyen de 14 %. Cette association était observée dans les trois catégories d’unités urbaines.
La présence d’un axe routier majeur à moins de 500 mètres de la résidence ne semblait pas être un facteur de risque de leucémie aiguë. Les résultats suivaient la même tendance pour les expositions au dioxyde d’azote et au carbone. En revanche dans les zones urbaines de moins de 5 000 habitants et celles de 5 000 à 99 000 habitants, le risque de leucémie aiguë lymphoblastique augmentait de 80 % chez les enfants les plus exposés au carbone suie par rapport à ceux les moins exposés. L’hypothèse des chercheurs ? Des sources de pollution aux PM2,5, en particulier celles de carbone suie, autres que le trafic routier (industrie, chauffage domestique…), pourraient être impliquées dans la survenue de ces cancers.
« Nos travaux supportent l’hypothèse d’un rôle de l’exposition périnatale à la pollution de l’air dans la survenue de leucémie aiguë chez l’enfant, appuyant en particulier l’implication des particules fines PM2,5 dans la leucémie aiguë lymphoblastique, avance dans un communiqué Aurélie Danjou, chercheuse Inserm et première autrice de la publication. Des études regroupant les données de davantage d’enfants pourraient aider à consolider les résultats concernant la leucémie aiguë myéloïde, mais aussi à mieux comprendre quelles sources de pollution sont à l’origine des associations et quels autres polluants pourraient jouer un rôle ».

Source : Inserm, Environmental Health

Ecrit par : Dorothée Duchemin – Edité par Emmanuel Ducreuzet