Pression sur le physique : en parler en famille chez le psychologue ?

08 mars 2023

La pression liée au physique exercée sur un enfant ou un adolescent est dans certains cas le fait des parents. Quand elle prend trop d’ampleur, cette dernière fragilise l’estime de soi. Et peut faire l’objet de consultations en famille chez le psychologue.

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Imposer à son enfant de se vêtir de telle ou telle façon, de rester très féminine ou à l’inverse le plus masculin possible, de rentrer dans les cases de la minceur sans être trop maigre mais un peu musclé, de se coiffer de telle manière sans discussion possible : voici quelques exemples de diktats physiques que les jeunes peuvent fréquemment subir.

Dans certains cas, « les attentes de leurs parents entrent en jeu », décrit Laurence, psychologue. « Et ce n’est pas un hasard. Bien souvent, quelque chose d’inconscient, une forme de déni se joue chez les parents qui peuvent réagir suite à un traumatisme, à une blessure de leur enfance et font tout pour ne pas reproduire ce qu’ils ont vécu. Quand d’autres se trouvent dans une forme de revanche sur la vie car ils ont réussi à se construire seuls et ont besoin de le montrer en société, en affichant leur réussite dans la tenue vestimentaire de leur enfant par exemple », poursuit la psychologue.

A l’évidence, il n’y a aucun souci « quand l’aspect physique reste un sujet léger, en conseillant par exemple à son enfant de se couvrir, de mettre une tenue adaptée ou de se coiffer », précise la psychologue. Mais cela « commence à poser problème quand les propos du parent sur son physique deviennent récurrents, relèvent de l’injonction, sont extrêmes, et génèrent de la souffrance chez l’enfant ou l’adolescent ».

L’enfant, le couple et la fratrie en consultation

Comment aider les enfants, les adolescents, mais aussi les parents ? « Dans ma pratique, je privilégie l’approche systémique qui prend en compte l’enfant avec ses parents et parfois la fratrie entière », décrit Laurence. « La famille arrive en consultation avec la partie émergée de l’iceberg, et le travail consiste à aller chercher celle qui n’est pas visible. Pourquoi l’aspect physique prend-il autant de place ? »

Comment se déroule un suivi en règle générale ? « Tout va dépendre de l’histoire et de la problématique de chacun. » Mais l’idée est de se concentrer sur l’entourage du jeune patient, l’environnement dans lequel il est baigné, tout ce qui va pouvoir nourrir sa souffrance au quotidien, au-delà de la problématique. Objectif : trouver l’origine et défaire les nœuds du mal-être. « Pour ce faire, nous allons explorer l’histoire de l’enfant, sa personnalité, sa place dans le système », poursuit Laurence.

Et dans le cas d’injonctions sur le plan physique ? « Les enfants peuvent arriver dans mon cabinet pour des troubles du comportement alimentaire, une perte d’estime de soi et, en grandissant, une tendance à se retrouver dans des relations d’emprise, en amitié comme dans leurs relations amoureuses tant ils ont été habitués à ce que l’on décide à leur place. »

« Souvent, les parents amènent l’enfant pour un problème de comportement telle que la colère, la désobéissance ou l’hyperactivité qu’ils souhaitent résoudre. Le travail est d’explorer ensemble ce qui se cache derrière le symptôme, et de proposer un espace de parole suffisamment « sécure » à l’enfant afin qu’il puisse s’autoriser à exprimer ses émotions et ressentis »

Thérapies… de couple

« Il arrive que des scènes vécues au sein des couples ou familles, dans leur intimité, se rejouent quasi à l’identique dans mon cabinet », atteste Laurence. Auquel cas la psychologue peut voir, comprendre, ressentir ce que décrit l’enfant dans son quotidien. « Un conflit dans le couple peut apparaître quand, par exemple, un des parents formule un reproche à l’enfant et que le second parent est en désaccord avec cette remarque. En effet, les résonances liées au comportement de l’enfant sont différentes chez chacun des parents et peuvent provoquer des désaccords qu’il est important de mettre en mots. »

Et quand l’enfant se retrouve au cœur d’une problématique qui ne le concerne pas ? « Dans cette situation, la thérapie peut finalement se concentrer sur le couple ». La colère de l’enfant, ou toute émotion qu’il exprime fortement, participe souvent à masquer les problèmes de communication dans le couple. Comme si l’émotion de l’enfant devenait le réceptacle de tous les non-dits.

  • Source : Interview de Laurence, psychologue, le 21 février 2023

  • Ecrit par : Laura Bourgault - Édité par : Emmanuel Ducreuzet

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