Valproate et grossesse : un risque de troubles neuro-développementaux confirmé chez l’enfant
25 juin 2018
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L’acide valproïque, molécule indiquée dans le traitement de l’épilepsie notamment, est reconnu comme tératogène. Afin d’obtenir des données encore plus précises sur l’impact chez l’enfant exposé in utero, l’ANSM a mené l’enquête auprès d’1,7 million de enfants nés entre 2011 et 2014. Le constat est sans appel, le risque de troubles neuro-développementaux est confirmé. Et il dépend de la dose administrée à la maman.
Le caractère tératogène de l’acide valproïque est confirmé. Des études suite à l’Affaire Dépakine ont en effet montré que le risque de malformations congénitales était 4 fois plus élevé chez les enfants nés d’une femme traitée pour une épilepsie. Afin d’en savoir encore plus sur l’impact de cette exposition, l’ANSM et la CNAM ont suivi 1,7 million d’enfants nés entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2014. Certains avaient été exposés à l’acide valproïque in utero, d’autres non. L’enjeu, « apporter des éléments nouveaux (…) sur la caractérisation du risque lié à [cette molécule] selon la dose et la période d’exposition pendant la grossesse ».
Les enfants inclus dans l’étude ont été suivis jusqu’à l’âge de 3,6 ans en moyenne, et 5 ans au maximum.. Différents indicateurs ont été relevés chez les petits : « les diagnostics de troubles mentaux et du comportement effectués lors d’une hospitalisation ou pour une prise en charge d’affection de longue durée, le recours à un orthophoniste, un orthoptiste ou un psychiatre. »
Le risque de troubles neuro-développementaux multiplié par 10
Les résultats sont édifiants :
« Cette étude confirme le risque de troubles neuro-développementaux précoces en lien avec l’exposition à l’acide valproïque pendant la grossesse », indique l’ANSM. Ce risque « est 4 à 5 fois supérieur parmi les enfants exposés par rapport à ceux dont la mère n’a pas reçu d’antiépileptique pendant la grossesse. » Et « jusqu’à 8 à 10 fois plus élevé parmi les enfants exposés aux doses les plus fortes ».
Autre point, la période d’exposition la plus à risque « pourrait se situer particulièrement au cours du deuxième et/ou du troisième trimestre de la grossesse ». Ce qui ne veut pas dire que le risque au premier trimestre est nul. D’autant que « l’exposition au valproate au cours du premier trimestre de grossesse est associée à un risque augmenté de malformations congénitales majeures ».
Les troubles mentaux moindres sous alternative à l’acide valproïque
La lamotrigine constitue l’une des principales alternatives à l’acide valproïque. Celle-ci expose à un risque 3 fois moins élevé de troubles mentaux, comparée à l’acide valproïque. Autre alternative, « la prégabaline pourrait être associée à un risque de diagnostic de troubles mentaux et du comportement augmenté de 1,5 fois par rapport aux enfants non exposés. Ce risque nécessite d’être surveillé et confirmé par d’autres études ».
Des mesures prises depuis 4 ans
Rappelons que depuis 2014, plusieurs mesures ont été prises pour limiter au maximum l’exposition fœtale à l’acide valproïque. Au niveau européen, il s’agit de « l’obligation de la prescription annuelle par un spécialiste, de la mise en place d’un formulaire d’accord de soin et de l’élaboration de documents de réduction du risque à destination des patientes».
En France, ces mesures ont été complétées « par l’apposition sur les boites d’un pictogramme et d’une mise en garde et la mise à disposition d’une carte patiente ».
En 2017, l’ANSM a décidé de la « contre-indication du valproate dans le traitement des épisodes maniaques des troubles bipolaires ». Cette molécule est désormais « interdite pendant la grossesse et ne doit plus être prescrite aux filles, adolescentes et femmes en âge de procréer (sauf circonstances exceptionnelles dans l’épilepsie) ».
A noter : depuis 2014, le nombre de femmes en âge de procréer sous valproate a diminué de 45%. Et le nombre d’enfants nés de grossesses exposées à la molécule a baissé de 66%.
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Source : Agence de sécurité du médicament et des produits de santé, le 22 juin 2018
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Ecrit par : Laura Bourgault - Edité par : Dominique Salomon