VIH-Sida : un troisième patient sur la voie de la guérison
20 février 2023
Grâce à une greffe de moelle osseuse, un patient atteint du VIH-Sida serait en phase de guérison. Une approche thérapeutique particulière indiquée contre la leucémie. Précisions.
Un patient allemand (Düsseldorf) atteint du VIH-Sida se trouve actuellement sur la voie de la guérison. « Un nouveau cas probable de guérison », selon les termes précis du communiqué publié ce 20 février par le consortium IciStem* dont fait partie l’Institut Pasteur. Jusqu’ici, deux cas avaient en effet été rapportés : en 2019 un patient suivi en Allemagne (Berlin), et le tout premier patient, originaire de Londres, en 2009. Deux autres patients de New-York et de Duarte (Etats-Unis) avaient aussi été considérés comme probablement guéris en 2022. Tous l’ont été suite à un traitement indiqué dans le cadre d’une autre pathologie.
La probable guérison contre le virus du Sida de cet homme aujourd’hui âgé de 53 ans serait l’heureuse conséquence « d’une greffe de moelle osseuse issue d’un donneur portant la mutation génétique CCR5 delta-32, connue pour protéger naturellement du VIH », détaillent les spécialistes de l’Institut Pasteur. Cette greffe de cellules souches est survenue dans la prise en charge d’une leucémie dont souffrait également le patient. Cette forme de cancer atteignant « les cellules du système immunitaire localisées dans la moelle osseuse ». Sacré défi que de trouver un donneur (donc volontaire), compatible et porteur de cette mutation, étant donné qu’elle est retrouvée chez moins de 1% de la population générale.
Aucune trace virale 4 ans après la greffe
Suite à cette intervention, pratiquée en 2013, le patient « a pu interrompre son traitement antirétroviral contre le VIH de manière supervisée ». Quatre ans après la greffe, plus aucune trace** du virus du Sida n’était détectable dans l’organisme du patient. « Au final, il s’agit d’une situation exceptionnelle quand tous ces facteurs coïncident pour que cette greffe soit un double succès de guérison, de la leucémie et du VIH », rapporte Asier Sáez-Cirión, responsable de l’unité Réservoirs viraux et contrôle immunitaire à l’Institut Pasteur et co-auteur de l’étude.
Immunothérapie et vaccin contre le VIH-Sida
De quoi confirmer qu’il est possible de guérir du VIH, 40 ans après la découverte du virus***. Cette guérison probable ouvre « de nouvelles perspectives thérapeutiques aux scientifiques et cliniciens ». Même si la greffe de cellules souches ne pourrait être généralisée.
En effet, cette technique « ne s’applique qu’aux personnes souffrant d’une maladie hématologique et pour qui aucune autre alternative thérapeutique existe. Dans le cas des personnes vivant avec le VIH, le traitement antirétroviral est actuellement la meilleure alternative thérapeutique », prolonge Sáez-Cirión. Sur l’année 2023, la recherche contre le Sida se base sur la mise en place « de nouvelles immunothérapies basées sur des anticorps neutralisants à large spectre et aussi des marqueurs prédictifs de rémission associés aux cellules naturelles tueuses » conclut Christophe d’Enfert, directeur général adjoint scientifique de l’Institut Pasteur.
A noter : certains patients sont dotés d’un mécanisme de contrôle naturel et d’un système immunitaire suffisamment efficient pour rendre la charge virale du VIH-Sida indétectable dans l’organisme, sans traitement antirétroviral.
*Asier Sáez-Cirión à l’Institut Pasteur, en collaboration avec l’hôpital universitaire de Düsseldorf (Allemagne), l’université d’Hambourg (Allemagne), l’université d’Utrecht (Pays-Bas) et l’Institut de recherche sur le sida IrsiCaixa (Espagne)
** ni particules virales, ni réservoir viral activable, ni réponses immunitaires contre le virus n’ont été retrouvés dans l’organisme du patient de Düsseldorf
*** le 20 mai 1983, deux chercheurs de l’Institut Pasteur Luc Montagnier et Françoise Barré-Sinoussi publiaient dans la revue Science la première description du virus responsable du Sida