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Anorexie, boulimie : soigner le corps et le rapport à l’image (vidéo)
22 novembre 2017
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Concernant à 95% des jeunes filles, les troubles du comportement alimentaire sont considérés comme des addictions. Ils affectent la perception que les patientes ont de leur propre corps et de la réalité. Une puberté difficile à accepter, des traumatismes ou encore l’image de la femme dans la publicité et les magazines… Les causes sont multiples et diffuses. Le Dr Bruno Rocher, psychiatre référent du centre de soins ambulatoires en addictologie du CHU de Nantes fait le point sur ces troubles du rapport au corps et évoque la prise en charge des malades.
« Deux baguettes de pain, un pot de Nutella et des céréales en une dizaine de minutes parfois. » Et ce plusieurs fois par jour dans les cas les plus graves. Les crises de boulimie, systématiquement associées à une méthode de purge comme des vomissements provoqués ou la prise de laxatifs, sont envahissantes et incontrôlables par définition. C’est une des pathologies qui amènent les patientes à consulter le centre de soins ambulatoires en addictologie. L’anorexie restrictive pure – pour laquelle la jeune fille n’absorbe presque aucun aliment – et l’anorexie purgative avec ou sans crises de boulimie constituent les autres troubles fréquemment soignés dans cette structure.
Conséquences de ces comportements néfastes pour la santé, « des dents abîmées car baignées par les remontées acides, des douleurs d’estomac, des glandes salivaires gonflées et, dans le cas de l’anorexie, une perte de poids extrême », détaille Bruno Rocher.
La puberté, un âge fragile
Ces troubles du comportement alimentaire sont des addictions pour lesquelles les causes restent difficiles à établir de façon certaine. Toutefois, certaines pistes sont évoquées. « Des éléments de personnalité plus ou moins influencés par le cadre familial reviennent souvent », note le Dr Rocher. Ainsi, « il arrive que la mère de la jeune patiente souffre elle-même d’anorexie ou soit obsédée par sa propre apparence physique ». Par ailleurs, sans être une causalité explicative, « une séparation familiale peut favoriser la survenue d’un trouble du comportement alimentaire ». Il peut s’agir de « divorce mais aussi d’un parent hospitalisé ou même d’un simple départ en colonie de vacances ».
En effet, l’adolescence, âge auquel survient généralement ce type de troubles, est le moment où l’enfant doit être capable de se retrouver autonome dans son parcours de vie. Et certains en éprouvent de grandes difficultés. Chez les filles, qui représentent la grande majorité des patients anorexiques et boulimiques, les changements liés à la puberté sont en outre souvent vécus comme particulièrement angoissants. « Certaines tentent de nier ou de contrôler leur féminité nouvelle par l’anorexie, car en perdant du poids, leur poitrine ne se développe pas et leurs règles s’interrompent ». Lorsqu’une jeune fille a été victime de traumatismes, comme un viol ou une agression dans l’enfance, elle peut également refuser de voir son corps se transformer. Sans oublier les silhouettes extrêmement maigres relayées et magnifiées par la publicité et les magazines notamment.
Hospitalisation ou suivi ambulatoire ?
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Pour ces addictions spécifiques, le travail de sevrage nécessite une prise en charge et des soins adaptés. Relais spécialisé dans ce domaine, le centre Barbara accueille les patientes âgées entre 15 et 35 ans. « Avant de les prendre en charge, nous effectuons un bilan de leur état », explique le psychiatre. Pour ce faire, « nous leur demandons un courrier personnel décrivant leur état et expliquant dans quelle démarche elles se trouvent ». Objectif, « estimer la gravité de la situation et grader la réponse ».
En fonction de la pathologie, l’équipe soignante établit un plan de soins. « En principe, les patientes nous consultent volontairement mais il arrive que certaines soient dans un vrai déni ou refusent de se faire soigner ». Lorsque leur état met leur vie en danger, les médecins peuvent décider de les hospitaliser contre leur volonté. Dans le cas de mineur, les parents décident. Dans celui d’une majeure, « on peut se placer sous la règle psychiatrique de l’hospitalisation sous contrainte sans consentement ». C’est nécessaire lorsque la patiente présente un indice de masse corporelle (IMC) de 13 (équivalent à 35 kg pour 1,60m). « D’autant que nous savons que la baisse de poids ne va pas s’arrêter là ». Dans ce cas, l’installation d’une sonde nasogastrique est parfois nécessaire.
Pour la plupart des autres patientes, une prise en charge en hôpital de jour ou par des consultations régulières pluridisciplinaires est élaborée. Des séances de médiation durant lesquelles les patientes participent à des ateliers d’expression corporelle, verbale ou émotionnelle, des repas thérapeutiques dont le déroulement correspond à un contrat signé entre la malade et l’équipe soignante. Objectif, « aider à manger, à apprécier le corps et à se relancer dans un processus d’autonomie », résume Bruno Rocher.
Changer de regard pour perdre l’addiction
Comme toute addiction, le sevrage nécessite un certain délai pour réussir. « Même si les symptômes s’atténuent rapidement dès la mise en place du traitement, il faut éviter d’annoncer une guérison rapide à la patiente », insiste Bruno Rocher. « Le risque de récidive est majeur dans ces pathologies et il faut se donner la possibilité de soins multiples, de recours en cas de rechute, avec des objectifs atteignables. »
Source : interview du Dr Bruno Rocher, addictologue à l’Espace BARBARA/Centre de Soins Ambulatoires en Addictologie, 8 novembre 2017
Ecrit par : Dominique Salomon - Edité par : Vincent Roche
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