Attendre un enfant… dans la grande précarité

08 octobre 2014

Sans ressource, éloignées du système de santé, les femmes enceintes plongées dans la précarité ne bénéficient que très rarement d’un suivi médical pendant leur grossesse. Une condition pourtant essentielle au dépistage de pathologies maternelles et infantiles.

En 2004 à Paris, 1 500 jeunes mamans ont accouché sans avoir vu de médecin ni de sage-femme pendant leur grossesse. Depuis, la situation ne s’est guère améliorée. « En 2011, un millier de femmes accouchait dans la même situation au sein des hôpitaux parisiens », révèle le Dr Bernard Guillon, président de l’Association pour le Développement de la Santé des Femmes (ADSF).

Ce manque de suivi impacte la santé de l’enfant à naître. « En raison d’une surveillance médicale trop tardive, d’éventuelles malformations congénitales, des handicaps, un retard de croissance intra-utérin ne sont pas détectés… ou pas à temps », soulignent les professionnels de l’ADSF. Par ailleurs, sans dépistage précoce chez la femme, de graves troubles comme l’hypertension ou le diabète gestationnel ne sont pas diagnostiqués, ou trop tardivement. C’est également le cas d’infections urinaires ou de pathologies infectieuses (hépatites B et C, VIH/SIDA).

Lutter contre l’absence de suivi obstétrical

L’ADSF effectue des maraudes pour aller à la rencontre des femmes les plus démunies. Cette précarité « se passe devant chez nous, à notre porte. Si besoin, nous apportons aux femmes des premiers soins pour ensuite les orienter vers des structures médicales (hôpitaux, Protection maternelle et infantile) ». La plupart d’entre elles vivent en effet dans un environnement très hostile.

En moyenne, 15% n’ont pas de logement fixe, et dorment dans des centres d’hébergement, des squats ou des bidonvilles. Ainsi, 80 à 100 femmes enceintes dorment chaque nuit dans les rues de Paris. Beaucoup souffrent de malnutrition, d’un manque de sommeil et d’une mauvaise hygiène de vie. Autant de conditions sociales qui par ailleurs « favorisent la consommation de drogue ». En plus de vivre dans la précarité, 70% des femmes enceintes (suivies au cours de l’étude ADSF de 2011) étaient toxicomanes.

Ces difficultés d’accès aux soins touchent notamment les migrantes originaires d’Afrique ou d’Europe de l’Est. Au sein de la communauté Rom, « 9 futures mères sur 10 ne sont pas suivies avant de donner la vie ». Fortement exposées au risque d’accouchement prématuré, ces femmes – en particulier les jeunes – ne mènent par leur grossesse à terme. Beaucoup de grossesses ne sont d’ailleurs pas désirées. A tel point « qu’à 22 ans, 43,3% des jeunes adultes issues de la communauté Rom ont déjà avorté », confirme le Dr Bernard Guillon. Enfin, « si dans cette population chaque femme tombe en moyenne enceinte 4 fois au cours de sa vie, seule la moitié des grossesses aboutit à la naissance d’un enfant vivant ».

  • Source : L’Association pour le Développement de la Santé des Femmes (ADSF) et les laboratoires IPRAD, octobre 2014

  • Ecrit par : Laura Bourgault - Edité par : Dominique Salomon

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