Bronchiolite : l’efficacité du Beyfortus mise en cause
09 octobre 2023
Alors que le Beyfortus, traitement préventif de la bronchiolite n’est plus disponible en ville, victime de son succès, un communiqué du Collège national des généralistes enseignants demande une meilleure évaluation du médicament. Explications.
Un succès justifié ? Le 15 septembre débutait la campagne d’immunisation des nourrissons contre la bronchiolite, avec le Beyfortus ce traitement préventif recommandé aux bébés nés après le 6 février 2023. Le 29 septembre un document de la Direction générale de la Santé (DGS) annonçait l’interruption de la livraison des officines en doses de Beyfortus 100 mg, soit la dose pour les bébés de 5 kg et plus. La DGS y recommande également de ne plus prescrire de nirsevemab 100 mg – la molécule du Beyfortus – en ville. Ainsi le médicament n’est plus disponible qu’en centre hospitalier. En cause ? « Une forte demande des parents et une adhésion au traitement supérieure à ce qui avait été anticipé en début d’année », note la DGS dans son courrier.
Le même jour, vendredi 29 septembre, le Collège national des généralistes enseignants pointait un manque de preuves concernant l’efficacité du Beyfortus pour les bébés sans risque identifié de développer une forme grave de la maladie. « A la lumière des données scientifiques publiées, le conseil scientifique du CNGE constate que le Beyfortus est efficace sur les infections à VRS (virus respiratoire syncytial, ndlr), mais que cette efficacité n’est pas démontrée (à ce jour) sur la réduction des hospitalisations dans la population générale des nourrissons à bas risque », écrivent les médecins dans un communiqué. Les nouveau-nés à haut risque ne sont pas seuls susceptibles de développer une forme grave puisque « 2 à 3 % des enfants de moins d’un an dont 87 % sans facteurs de risques identifiés seraient hospitalisés pour bronchiolite sévère », note le CNGE.
Que dit la Haute autorité de Santé (HAS) ?
Dans un article mis en ligne le 1er août, la HAS avait estimé que le service médical rendu était faible pour les nourrissons à risque élevé – ceux-ci ont déjà accès palivizumab (Synagis), traitement préventif disponible uniquement à l’hôpital – et, considéré comme modéré « chez les nouveau-nés et les nourrissons avec ou sans facteurs de risque et non éligibles au palivizumab, au cours de leur première saison de circulation du VRS ». Quant à l’amélioration du service rendu, il est jugé mineur pour les nouveau-nés non éligibles au palivizumab et absent pour ceux qui l’étaient.
Le collège national des généralistes enseignants rappelle que le Beyfortus a fait ses preuves pour les nourrissons à haut risques de formes graves mais il estime qu’« il est indispensable qu’une thérapeutique destinée à la population générale bénéficie d’une évaluation médico-économique et soit rigoureusement et scientifiquement évaluée dans la population dans laquelle elle est indiquée ».
Une étude plus convaincante est attendue. L’étude Harmonie, menée en situation réelle et dont les résultats ont été en partis dévoilés par Sanofi en mai dernier, montre que le Beyfortus réduit de 83 % le risque d’hospitalisations des nourrissons dues au VRS. Les résultats définitifs devront être disponibles en 2024. « Ces résultats sont très attendus, mais l’absence de procédure d’insu (parents et soignants savaient quel bébé avait reçu le traitement) atténue fortement le niveau de preuve de cet essai », prévient d’emblée le CNGE.
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Source : DGS, suspension temporaire des délivranbces de Beyfortus 100 MG (nirsevimab), 29 septembre 2023 – Avis de la HAS sur le Beyfortus, 1er août 2023 – Nirsevimab en prévention des infactions respiratoires à VRS, Collège national des génralistres enseignants, 29 septembre 2023.
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Ecrit par : Dorothée Duchemin - Edité par Emmanuel Ducreuzet