Cigarette électronique : le vapotage passif, ça existe
13 septembre 2016
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Le tabagisme passif correspond au fait d’inhaler de manière involontaire la fumée dégagée par un ou plusieurs fumeurs. Il expose l’entourage, en particulier les enfants, à diverses pathologies. Qu’en est-il d’une exposition passive à la fumée de cigarette électronique ? Le Dr Luc Réfabert, allergo-pneumo-pédiatre à Paris, fait le point sur les connaissances en matière de fumée d’e-cigarettes dans la revue Pédiatrie pratique.
Si la fumée de cigarette électronique est considérée comme largement moins nocive que celle de tabac, elle contient des composants très loin d’être anodins. En particulier pour des jeunes enfants.
Ainsi, « le liquide des cigarettes électroniques est principalement constitué d’un mélange de propylène glycol et de glycérol (75%), d’eau (4%), de nicotine (2%), d’arômes (2%) et parfois d’alcool », explique le Dr Réfabert. Concernant le propylène glycol, « le seul rapport connu à ce jour, de l’INRS en 1994, conclut à la non-toxicité du produit, aussi bien en ingestion de forte dose qu’en inhalation et contact cutané ». Toutefois, « on peut se poser la question de la toxicité de son inhalation à long terme chez les personnes souffrant d’asthme ou les nourrissons ».
La nicotine, pas anodine
Quant à la nicotine, « elle a des effets néfastes sur le fœtus, l’enfant et l’adolescent ». Dans le détail, « en passant la barrière placentaire, elle a une toxicité importante pour le fœtus, principalement d’ordre pulmonaire », poursuit-il. Les malformations de l’appareil respiratoire sont trois fois plus élevées chez les femmes exposées à la nicotine que chez les autres. Sans oublier que la présence de cette substance dans les cigarettes électroniques constitue un danger d’ingestion accidentelle chez les jeunes enfants de vapoteurs. En effet, « la concentration est suffisante pour que l’absorption de quelques millilitres puisse causer le décès d’un enfant », alerte Luc Réfabert.
A noter que, comme dans le cas du tabac, les toxiques de la cigarette électronique se déposent sur les surfaces et les vêtements. Après un vapotage expérimental, « la quantité de nicotine déposée sur le sol et sur les vitres était multipliée respectivement d’un facteur 47 et 6 ». Le risque d’exposition d’un nourrisson à 4 pattes sur le sol d’un logement où ses parents vapotent ne peut être écarté.
Pollution de l’air
Une étude récente indique que la vapeur des e-cigarettes entraîne des modifications de l’ADN et des morts cellulaires indépendamment de la présence de nicotine. En outre, des études montrent que « l’aérosol n’est pas toujours dénué de toxiques », indique le pédiatre. Dans un travail en particulier, « l’utilisation de cigarettes électroniques augmentait significativement les particules fines dans l’air ». Résultat, le taux de particules fines dans l’air ambiant était égal à 18% de celui de cigarettes de tabac. Pour la nicotine, de 10%. « La quantité provoquée par le vapotage n’est donc pas négligeable », souligne-t-il.
Conclusion, « le vapotage passif existe », estime Luc Réfabert. « Notre société doit se préoccuper de l’effet des cigarettes électroniques sur le cerveau, en particulier des jeunes ». Enfin, « la nicotine ne doit pas être banalisée », conclut-il. « Nous devons nous interroger sur le risque d’encourager de nouvelles générations de dépendants à la nicotine ».
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Source : Pédiatrie pratique, n°275/276, février-mars 2016
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Ecrit par : Dominique Salomon - Edité par : Emmanuel Ducreuzet