Les troubles du sommeil, premiers signes de la maladie de Charcot ?
04 février 2025
Selon une équipe française, les troubles du sommeil préexistent à la survenue des symptômes moteurs dans la maladie de Charcot. Traiter les troubles du sommeil est-il un moyen de freiner la progression de la maladie ? C’est ce que les scientifiques ont observé chez la souris.
A ce jour, il n’existe aucun traitement pour soigner la maladie de Charcot qui conduit au décès du patient dans les 3 à 5 ans qui suivent l’apparition de la maladie. La sclérose latérale amyotrophique (SLA) ou maladie de Charcot est une maladie neurodégénérative liée à la mort progressive des cellules nerveuses appelées motoneurones. Celle-ci est responsable d’une atrophie progressive et rapide des muscles, l’apparition de troubles et déficits moteurs à l’origine de la perte d’autonomie des patients. L’atteinte des muscles respiratoires provoque le décès.
Comme c’est le cas pour plusieurs autres maladies neurodégénératives, des chercheurs de l’Inserm et de l’Université de Strasbourg se sont demandé si des troubles du sommeil – induits par l’évolution de la maladie – pouvaient préexister aux troubles moteurs et si la restauration du sommeil pouvait freiner l’évolution de la maladie. Ils ont ainsi analysé des dizaines d’enregistrements de sommeil de groupes de personnes atteintes de SLA, à différents stades de la maladie – un groupe n’avait pas encore développé de symptômes respiratoires, un autre était porteur de mutations génétiques et présentait un risque accru de développer la maladie. Ces résultats ont été comparés à ceux de groupes contrôles.
L’hypothalamus impliqué dans le tout début de la maladie ?
« Ces tests indiquent que les deux groupes d’individus souffraient du même type de troubles du sommeil : un temps d’éveil plus important et une quantité de sommeil profond inférieure aux données issues des groupes contrôles », écrivent les auteurs de l’étude dans un communiqué, publié mardi 4 février. Les résultats, publiés dans le journal Science Translational Medicine, suggèrent que les troubles du sommeil sont présents et observables, et ce de façon précoce, plusieurs années avant la manifestation des troubles moteurs.
Les scientifiques ont ensuite cherché l’origine de ces troubles du sommeil dans le cerveau. Une piste : les neurones à orexine, des neurones spécifiques de l’hypothalamus connus pour jouer un rôle dans la stimulation de l’état d’éveil. Chez des modèles de souris atteintes de SLA, chez qui les mêmes troubles de sommeil ont été observés, les chercheurs ont découvert que les circuits de neurones où sont intégrés les neurones à orexine sont altérés, par la disparition de neurones annexes au cours de la maladie.
Une nouvelle cible thérapeutique ?
Une molécule inhibitrice de l’orexine, déjà prescrite contre les insomnies, a été administrée aux souris malades. Résultats : après une seule prise orale le sommeil des souris a été restauré. L’activité des neurones annexes des neurones à orexine a été également restaurée et après 15 jours de traitement, une conservation des motoneurones a été observée chez la souris. L’équipe de chercheurs veulent désormais tester la molécule chez des patients atteints de SLA : restaurer leur sommeil peut-il freiner la maladie ?
« Les découvertes de notre équipe sont importantes à deux niveaux. Tout d’abord, elles mettent en lumière une nouvelle chronologie des symptômes de la SLA, questionnant à nouveau les origines de la maladie, et notamment le rôle du cerveau dans sa genèse, explique Luc Dupuis, co-dernier auteur de l’étude. Elles représentent aussi un léger espoir pour les malades, et ceux qui déclareront la maladie, en imaginant qu’agir sur les premières manifestations de celle-ci puissent ralentir sa progression extrêmement rapide. »
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Source : Inserm, Science Translational Medicine
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Ecrit par : Dorothée Duchemin – Edité par Emmanuel Ducreuzet