Levothyrox: 1 000 euros d’indemnisations par patient
25 juin 2020
Ce 25 juin, la Cour d’appel de Lyon a pris la décision de condamner le laboratoire Merck, fabricant du Levothyrox, à indemniser chaque plaignant d’une somme de 1 000 euros pour préjudice moral. En cause, la nouvelle formule du médicament accusée de provoquer de nombreux effets secondaires.
« Une faute pour préjudice moral », voilà ce qu’a commis le laboratoire Merck dans l’affaire du Levothyrox, selon la Cour d’appel de Lyon. Cette dernière s’est prononcée ce 25 juin, en condamnant le fabricant à indemniser chaque plaignant de 1 000 euros.
Le motif de la procédure ? Des effets secondaires massivement rapportés par les patients suite au changement de formule du Levothyrox. « Merck ne comprend pas la décision de la Cour d’Appel de Lyon et va se pourvoir en cassation » déclare Florent Bensadoun, directeur juridique de Merck en France. « Rien n’est définitif car cette décision pourrait être remise en cause par la Cour de Cassation. »
Accompagner les patients vers la substitution
Mais ce procès porte sur un manque d’information dénoncé par les patients, plus que sur la molécule en elle-même, qui ne présente aucune « toxicité propre » comme le rappelait l’ANSM en juin 2019. Pour comprendre, rembobinons.
Le changement de formule du Levothyrox a été initié à la demande de l’ANSM en mars 2017, à cause d’un manque de stabilité de l’ancienne substance active. A cette date, il était conseillé d’effectuer un dosage hormonal pour vérifier que le changement de formule ne présente aucun risque. « Le Levothyrox est un médicament à marge thérapeutique étroite. Des variations même infimes peuvent engendrer des effets secondaires », étaye Valérie Léto, pharmacienne Responsable de Merck en France. « C’est d’ailleurs ce qui se passe fréquemment et de façon transitoire lorsqu’un patient voit son dosage adapté. »
Durant l’été 2017, de nombreux patients se sont plaints d’effets indésirables liés à la nouvelle formule, et ont réclamé le retour de l’ancienne. Pour préparer les patients à un changement de traitement, le choix du progressif a donc été fait : l’ancien médicament a été remis sur le marché à compter du 15 septembre 2017, temporairement. Le retrait officiel du marché français est établi au mois de septembre 2020. « Actuellement, les patients disposent de 6 alternatives médicamenteuses pour pallier cette dérégulation hormonale », explique Valérie Léto. Pour accompagner la substitution du traitement à base de lévothyroxine, le ministère en charge de la santé a publié une fiche conseil pour les patients et les soignants.
Et qu’en est-il du manque d’information dénoncé par les patients contre le laboratoire Merck ? Pour défendre ce manque de sensibilisation, une action collective de 4 115 patients a été menée par Me Christophe Léguevaques. Le 5 mars 2019, le Tribunal d’instance de Lyon rejetait la demande : indemniser chaque patient de 10 000 euros pour préjudice moral.
Aujourd’hui, avec les 1 000 euros indemnisés par plaignant, les patients ont eu gain de cause. Mais le laboratoire Merck maintient le fait que « le dispositif d’information mis en place par Merck en 2017 pour le passage de l’ancienne à la nouvelle formule du Levothyrox a bien été pertinent et conforme au cadre réglementaire », appuie Florent Bensadoun. « En tant que laboratoire, nous ne sommes pas en droit de communiquer directement avec les patients », étaye Valérie Léto. « Mais nous avons informé plus de 100 000 professionnels de santé, les pharmaciens et les associations de patients, pour gérer au mieux l’accompagnement des patients. » Une information « mise en place en étroite coordination avec l’ANSM plus d’un an à l’avance », mais aussi avec « les experts en endocrinologie et les associations de patients ».
A noter : les molécules à base de lévothyroxine sodique sont prescrites aux patients souffrant d’hypothyroïdie (insuffisance ou absence de sécrétion de la glande thyroïde) mais aussi pour atténuer la sécrétion excessive d’une hormone stimulant la thyroïde, la TSH (Thyroid stimulating hormone).
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Source : Cour d’appel de Lyon - Interview de Valérie Léto, pharmacienne Responsable de Merck en France, M. Florent Bensadoun, directeur juridique de Merck en France, le 25 juin 2020
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Ecrit par : Laura Bourgault - Edité par : Emmanuel Ducreuzet