Lumière artificielle : des seuils d’exposition trop élevés pour nos yeux ?

17 avril 2024

Une étude de l’Inserm suggère que la lumière des nos intérieurs, et notamment la lumière bleue largement présente dans les LED, aurait des effets délétères sur l’œil à des doses d'exposition bien inférieures à celles jusqu'alors estimées. Explications.

On le sait, la lumière du soleil peut être dangereuse pour les yeux si on ne s’en protège pas. Elle est notamment responsable de l’apparition et de la progression de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA). Mais la lumière naturelle n’est pas la seule à nuire à notre bonne santé visuelle. « Il est en particulier établi que la lumière bleue, émise notamment par les LED, endommage les cellules de la rétine et entraîne des troubles du sommeil et d’autres anomalies associées à une dérégulation du rythme circadien », note l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) dans un récent article.

Pour nous protéger des effets de la lumière artificielle, des normes ont été établies voici près de 40 ans. Toutefois, selon Alicia Torriglia, chercheuse à l’Inserm, ces normes seraient obsolètes et les doses, exprimées en joules par cm2, auxquelles les éclairages artificiels ont été jugés dangereux, largement surestimées.

La lumière blanche composée de différentes couleurs

Naturelle ou artificielle, la lumière blanche combine des rayons de différentes couleurs, chacun correspondant à une longueur d’onde spécifique. Chaque source de lumière combine différentes couleurs à des longueurs d’onde variables. La toxicité des lumières dépend donc de son intensité mais aussi des longueurs d’onde dont elle est composée.

  • La lumière bleue : dans les années 80, la Commission internationale de protection contre les rayonnements non ionisants a fixé des valeurs limites d’exposition de la rétine. Une exposition est ainsi considérée comme nocive à partir de 11 joules/cm² chez les rongeurs, à partir de 22 joules/cm² chez les primates. Pourtant, la récente étude de l’Inserm, publiée dans Environment international, montre des seuils de tolérance bien plus bas. « Nous avons dû interrompre nos expériences au tiers du temps prévu, pour ne pas faire souffrir les animaux exposés à une lumière qui respectait pourtant les seuils établis », souligne Alicia Torriglia, citée par l’Inserm. « La limite de 11 J/cm² pour la lumière bleue est nettement surévaluée pour le rat, ce qui laisse supposer que c’est sûrement le cas aussi pour le primate et l’humain. »
  • La lumière verte : L’étude suggère également que la lumière verte cause des effets délétères sur l’œil, avec une invasion de la rétine par des cellules pro-inflammatoires huit fois plus importantes que la lumière bleue
  • La lumière rouge :  Cette dernière présente dans les ampoules à incandescence, remplacées par les LED sur décision de l’Union européenne, réduirait au contraire la perte des photorécepteurs, les cellules sensitives de la rétine.

Revoir les seuils réglementaires ?

Pour Alicia Torriglia, ce sont l’ensemble des seuils réglementaires d’exposition qu’il faudrait revoir. Elle ajoute : « L’effet de la lumière sur la rétine est complexe, elle ne dépend pas seulement de la quantité, mais aussi du moment des expositions. La rétine a un rythme circadien et sa sensibilité pendant la journée n’est pas la même que la nuit. Des changements physiologiques qui interviennent la nuit la rendent plus sensible à la lumière et plus assujettie au stress phototoxique ». L’Inserm met donc en garde contre les LED et les écrans le soir et la nuit, surtout chez les enfants, qui présentent des seuils de sensibilité plus bas que ceux des adultes.

  • Source : Inserm

  • Ecrit par : Dorothée Duchemin – Edité par Emmanuel Ducreuzet

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