Le microbiote, la raison de nuire des moustiques ?
11 septembre 2017
HildeAnna/shutterstock.com
L’importance du microbiote chez l’humain est démontrée sans cesse depuis plusieurs années déjà. Qu’en est-il des autres espèces animales, et en particulier du moustique ? Ce sujet est de grand intérêt pour les chercheurs car les bactéries composant le microbiote de ces insectes – et des larves qui les précèdent – auraient un impact sur leur capacité à nous nuire. Et plus précisément à transmettre des pathogènes humains comme le chikungunya et le zika.
« Les caractéristiques biologiques des moustiques adultes, comme leur taille ou leur durée de vie, dépendent des conditions environnementales auxquelles ils sont exposés » au cours de leur vie. Par conséquent, des chercheurs de l’Institut Pasteur et du CNRS*, qui se sont penchés sur le microbiote de ces insectes, se sont demandé si les variations du microbiote des larves (qui se développent dans l’eau) altéraient leur capacité, une fois adulte, à transmettre des maladies comme la dengue ou le zika.
Pour ce faire, ils se sont penchés sur Aedes aegypti, vecteur majeur d’arbovirus comme ceux de la dengue, de la fièvre jaune, du zika et du chikungunya. Ce moustique existe sous une forme urbaine et une forme forestière en Afrique sub-saharienne. Le moustique « urbain » grandit dans l’eau stagnante de récipients artificiels (par exemple, des pneus usés ou bien des bidons laissés à l’abandon) tandis que le moustique « forestier » se développe dans l’eau de gîtes naturels (par exemple, dans des creux de rochers ou des trous d’arbres). L’environnement et les bactéries auxquels ces larves sont exposées sont donc bien différents. Résultats, sans surprise « des différences de microbiote intestinal entre ces deux espèces de larves » ont été relevées.
Des capacités de transmission variables
En laboratoire, « les chercheurs ont ensuite démontré que l’exposition aux micro-organismes présents dans un gîte larvaire, lors du développement des larves, se répercute sur les caractéristiques morphologiques et physiologiques des moustiques adultes, et notamment sur leur capacité vectorielle ». En effet, « l’exposition à différentes bactéries entraîne des variations dans la vitesse de développement des larves, la taille des adultes, leur système immunitaire, et leur sensibilité au virus de la dengue ».
« Ces connaissances accrues sur le type de bactéries présentes dans les milieux aquatiques où se développent les larves de moustiques, pourraient permettre, dans le futur, d’élaborer de nouvelles stratégies de contrôle », estiment les chercheurs. « Par exemple, les gîtes larvaires où prolifèrent les moustiques les plus susceptibles de devenir des vecteurs d’arbovirus pourraient être ciblés en priorité. »
Pour autant, « nous n’avons pas à l’heure actuelle établi si les larves urbaines ou forestières sont plus à même de transmettre des pathogènes humains », précise Louis Lambrechts de l’Institut Pasteur et co-auteur de ce travail. Et ce d’autant que « la réalité n’est peut-être pas manichéenne ». En d’autres termes, peut-être que certains moustiques forestiers et certains moustiques urbains présentent des capacités de nuisances plus importantes que leurs congénères et voisins.
*en collaboration avec des équipes de l’IRD, de l’Université Claude Bernard Lyon 1 et du CIRMF au Gabon. Dans le détail, les laboratoires français impliqués sont : le laboratoire « Hôtes, vecteurs et agents infectieux : biologie et dynamique » (CNRS/Institut Pasteur), le laboratoire « Maladies infectieuses et vecteurs : écologie, génétique, évolution et contrôle » (CNRS/IRD/Université de Montpellier) et le laboratoire « Ecologie microbienne » (CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1/Inra/Vetagro Sup)