Notre corps peut-il s’habituer aux vagues de chaleur à répétition ?

10 août 2022

La chaleur stresse nos organismes, qui n’ont, vagues répétées obligent, pas le temps suffisant pour bien récupérer. Mais elle a aussi bien d’autres effets délétères...

Le corps humain dispose d’une fantastique capacité d’adaptation aux températures extérieures : la thermorégulation, un ensemble de réflexes qui lui permet de maintenir sa température interne aux alentours de 37 °C. Lorsqu’il fait chaud, il augmente par exemple son débit sanguin et ses vaisseaux se dilatent, afin de mieux dissiper la chaleur aux extrémités. Et surtout, il transpire : ainsi, il peut se rafraîchir naturellement grâce à l’évaporation de la sueur à la surface de la peau. Mais ces mécanismes sont très coûteux en énergie pour l’organisme. Et ils sont de toute manière défaillants chez les personnes plus fragiles, notamment les plus de 65 ans, les femmes enceintes, les bébés et les enfants.

Plus ces vagues de chaleur se répéteront, plus elles imposeront donc de recourir à des dispositifs extérieurs (douche fraîche ou climatisation, et bien sûr eau potable en quantité suffisante) pour suppléer nos capacités corporelles, forcément limitées. On ne peut pas vraiment compter sur nos facultés d’adaptation : l’évolution des organismes vivants se déroule à l’échelle de plusieurs milliers d’années, tandis que le changement climatique ne nous laisse désormais qu’un peu moins d’un siècle.

Des nuits de plus en plus chaudes

La chaleur a aussi d’autres effets physiologiques sur l’organisme humain : elle rend irritable et surtout, elle empêche de dormir. En mai dernier, une étude danoise a montré qu’indépendamment de la température de la chambre, dès qu’il fait plus de 25 °C dehors, on dort moins et moins bien. On s’endort plus tard, on se réveille plus tôt et on se réveille davantage durant la nuit. Cette dette de sommeil a des conséquences délétères pour la santé, entraînant notamment des troubles de mémoire et de concentration.

Or, les nuits anormalement chaudes seront probablement plus nombreuses et plus fréquentes que les journées de canicule ! C’est ce qu’évoque une étude internationale parue début août, qui suggère – pour la première fois – que ces nuits tropicales répétées pourraient augmenter la mortalité dans le monde, et même de 60 % selon le pire scénario envisagé à l’horizon 2100. Cosignée par un groupe de chercheurs de Chine, de Corée du Sud, du Japon, d’Allemagne et des États-Unis, l’étude s’appuie sur les données de mortalité et les températures nocturnes relevées dans 28 villes entre 1980 et 2015. Et suggère d’intégrer désormais la température nocturne dans les systèmes d’alerte de canicule.

On sait également que la chaleur exacerbe les pathologies cardiaques, respiratoires, rénales et mentales existantes. Qu’elle multiplie les infections virales et microbiennes et augmente les effets néfastes de la pollution. C’est donc en aménageant nos habitats et nos modes de vie que nous aurons le plus de chances de nous adapter. Bien au-delà de la seule question de la température, il faudra s’habituer à moins dormir, mais aussi trouver comment se protéger de la pollution et des maladies, et faire face aux pénuries d’eau potable et de nourriture que ces vagues de chaleur ne manqueront pas d’entraîner.

  • Source : OneEarth, mai 2022 ; The Lancet Planetary Health, août 2022

  • Ecrit par : Clara Delpas - Édité par : Emmanuel Ducreuzet

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