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Un nouveau sondage OpinionWay pour le site deuxiemeavis.fr apporte un éclairage surprenant sur la manière dont les Français perçoivent la prévention en général. Des résultats dont les institutions de santé publique devraient tenir compte pour adapter leurs campagnes nationales. Car si la prévention suscite une adhésion « de principe », elle est pour beaucoup un réflexe encore largement théorique, à en croire ce nouveau sondage. Quant à l’intérêt du dépistage, il ne semble pas complètement compris.
62 % des Français estiment que, dans un contexte de pénurie de médecins et de délais de consultation allongés, il vaut mieux « prévenir que guérir ». Pourtant, 30 % disent comprendre l’importance de la prévention tout en ayant encore du mal à passer à l’action. « On observe un décalage entre la prise de conscience et le passage à l’acte, analyse Ronan Chastellier, sociologue et maître de conférences à l’Institut d’études politiques de Paris, qui a collaboré à cette enquête OpinionWay. Ces résultats montrent que si la prévention bénéficie d’une adhésion de principe, elle se heurte à une “barrière invisible à l’entrée”, avec un déficit d’accessibilité, d’équité et d’accompagnement pratique, ce qui limite son appropriation réelle par la population ».
Comment expliquer ce « manque d’enthousiasme » envers la prévention ? Trois facteurs principaux ressortent du sondage. D’abord, 41 % des Français en bonne santé ne se sentent pas concernés par les campagnes de prévention. Ensuite, 32 % estiment que celle-ci consiste à anticiper des problèmes de santé qu’ils préfèrent ne pas envisager, ce qui traduit une forme de déni ou de crainte face à la maladie. Enfin, 26 % jugent les messages de prévention trop anxiogènes.
Toute la difficulté dans les messages de prévention est en effet de trouver le juste équilibre entre alerter, responsabiliser et ne pas générer une sorte de peur paralysante vis-à-vis de la maladie. Pour Ronan Chastellier, « la prévention souffre à la fois d’un déficit d’identification et d’une communication souvent perçue comme culpabilisante ».
Toujours selon le sondage, 41 % des Français en bonne santé ne se sentent pas concernés par la prévention. L’enjeu et l’intérêt du dépistage restent donc mal compris. « En octobre 2023, ils étaient déjà 45 % à déclarer ne pas se faire dépister en l’absence de symptômes », rappelle le Dr Antoine Szmania, médecin urgentiste et directeur médical de deuxiemeavis.fr.
Parmi les 62 % de Français qui anticipent les problèmes de santé, la consultation annuelle chez le médecin généraliste est bien ancrée comme « rituel » pour la majorité (77 %, et jusqu’à 88 % chez les plus de 65 ans). En revanche, d’autres gestes sont moins systématiques : 60 % réalisent régulièrement des prises de sang mais seulement34 % chez les 18-24 ans.
La vaccination en général est réalisée par 58 % des Français, et jusqu’à 73 % chez les plus âgés, signe d’une plus grande sensibilisation aux risques. Enfin, à peine un peu plus de la moitié des personnes interrogées (53 %) participe aux dépistages organisés par l’Assurance maladie pour les cancers du sein, du col de l’utérus et du côlon.
Le sondage montre aussi que les Français agissent souvent trop tard : pour 61 %, et jusqu’à 70 % chez les plus de 50 ans, ce sont les symptômes physiques (fatigue, douleurs, etc.) qui les incitent à agir (alors que de nombreuses maladies restent longtemps silencieuses). Pour 60 %, ce sont des résultats d’analyses préoccupants qui déclenchent une action.
Seuls 28 % se disent réceptifs aux messages de l’Assurance maladie, 18 % aux messages de prévention de leur mutuelle et 17 % à un bilan de santé digital.
68 % des Français (75 % des 35-49 ans), estiment que la prévention en santé est réservée aux personnes les plus favorisées, c’est-à-dire celles mieux informées, disposant d’un meilleur accès aux soins et d’un budget santé plus conséquent.
Ce constat questionne la capacité du système à atteindre réellement l’ensemble de la population. En matière de prévention, il existerait une « fracture » entre ceux qui savent, qui peuvent et qui ont les moyens, et les autres.
Source : Enquête OpinionWay pour le site deuxiemeavis.fr parue le 14 octobre 2025 « Les Français et la prévention santé » Septembre 2025 et communiqué de presse. Réalisée fin août 2025 auprès d’un échantillon de 1 008 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus.
Ecrit par : Hélène Joubert ; Édité par Emmanuel Ducreuzet