Pourquoi sacrifier ses seins avant un cancer ?

14 mai 2013

La mastectomie bilatérale préventive reste la mesure la plus efficace de prévention du risque de cancer du sein en cas de mutation BRCA1/2. ©Phovoir

L’image d’Angelina Jolie, actrice et réalisatrice hollywoodienne, a pris une dimension nouvelle. Dans une tribune publiée dans le New York Times, elle annonce avoir subi une double mastectomie préventive. Porteuse d’une mutation génétique la plaçant à haut risque’ de cancer du sein et de l’ovaire, elle a choisi l’ablation des deux seins. En France, cette opération est proposée depuis 2004 à certaines patientes. Lesquelles ?

« En France, les critères pour déclencher une étude génétique chez une femme sont précis », rappelle le Dr Pascale This, endocrinologue et gynécologue à l’Institut Curie (Paris). « L’observation d’un nombre anormalement important de cancers du sein ou de l’ovaire chez des personnes jeunes dans la famille proche en est un. » La femme peut alors, si elle le souhaite, bénéficier d’une recherche de mutation des gènes BRCA1 et BRCA2. Environ 5% des cancers du sein se développent chez des femmes porteuses de ces mutations.

Angelina Jolie était justement porteuse de cette mutation. D’après ses propos dans le New York Times, elle présentait un risque de 87% de développer un cancer du sein. Et de 50% d’avoir un jour un cancer de l’ovaire. Elle a donc subi une double mastectomie préventive à la fin du mois d’avril. L’ablation des ovaires quant à elle, n’a pas encore été pratiquée.

Une option radicale mais efficace

« La mastectomie préventive est fréquente aux Etats-Unis, au Canada anglophone et aux Pays-Bas », poursuit Pascale This. « Là-bas, jusqu’à 50% des femmes concernées optent pour cette opération. En France en revanche, probablement pour des raisons culturelles, moins de 5% des patientes font ce choix. » Or, depuis les recommandations émises par l’Institut national du Cancer (INCa) en 2004, « nous nous devons d’informer que cette option existe. Mais on ne la recommande pas pour autant », précise-t-elle. « Nous pouvons aussi  leur proposer une méthode de surveillance attentive avec pour objectif un dépistage très précoce. Pour ce faire, le suivi – qui débute à l’âge de 30 ans – associe annuellement des mammographies, des échographies et des IRM mammaires », poursuit le Dr This. Mais « cette méthode ne réduit pas le risque de cancer du sein ».

Si toutefois la patiente s’oriente vers la double mastectomie, « elle peut rencontrer plusieurs fois un chirurgien reconstructeur, un gynécologue, des psychologues… » Prise en charge par l’Assurance maladie, l’ablation des deux seins chez des patientes à haut risque, réduit le risque de cancer du sein de plus de 95%. « Cette option est très encadrée par des réunions de concertation entre professionnels. Nous veillons toujours à ce que les femmes soient bien sûres de leur décision car cette opération est très mutilante. Les conséquences esthétiques et sur la sexualité peuvent être lourdes. Les patientes doivent en être conscientes. » Pour le cancer des ovaires, « l’ablation n’est pas une option, mais une recommandation », conclut le Dr This.

Ecrit par : Dominique Salomon – Edité par : David Picot

  • Source : New York Times, 14 mai 2013 – interview du Dr Pascale This, endocrinologue et gynécologue à l’Institut Curie, à Paris, 14 mai 2013

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