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Le manque de suivi des graves maladies chroniques : voici l’un des dommages collatéraux du confinement les plus inquiétants en termes de santé publique…. Exemple : les pertes de chances dans la population féminine du côté des maladies cardiovasculaires.
« Entre le télétravail ou plus de travail, l’éducation et l’occupation des enfants, la solitude et la précarité pour certaines, la gestion des repas, le ménage, le conjoint trop présent ou trop absent… la gestion du quotidien a été particulièrement lourde et difficile », étaye la Fondation “Agir pour le cœur des femmes”, à l’occasion de la Journée mondiale d’action pour la santé des femmes, organisée ce 28 mai.
« Pour autant, beaucoup des femmes continuent de ne pas s’écouter. » Ainsi, depuis le début du confinement, les patientes consultant pour des symptômes cardiovasculaires arrivent bien trop tard à l’hôpital. « Les tableaux symptomatiques s’avèrent extrêmement avancés », prévient le Pr Claire Mounier-Vehier, chef du service cardiologie au CHU de Lille et co-fondatrice de la Fondation.
L’anxiété va souvent de pair avec d’autres facteurs de risque associés aux pathologies cardiovasculaires : « l’insomnie, le tabagisme*, une mauvaise alimentation, l’excès d’alcool, la sédentarité, une prise de poids… ». Un effet décuplé par la vulnérabilité physiologique des femmes, ces dernières ayant « de nombreux récepteurs aux hormones du stress » et une fragilité accrue des artères comparées aux hommes. Enfin, sous l’effet de l’inquiétude, l’amygdale féminin, centre cérébrale des émotions, se trouve sur-sollicité. Cette glande « stimule la moelle osseuse qui provoque une augmentation des globules blancs », un phénomène « entraînant l’inflammation artérielle ».
Les femmes doivent être attentives à d’éventuelles anomalies cardiovasculaires laissant supposer une fatigue du cœur : un essoufflement à l’effort, une fatigue lancinante, des douleurs digestives, d’autres entre les épaules, une sensation d’angoisse et d’oppression. Des symptômes bien plus insidieux, comparés à l’intense douleur thoracique éprouvée par les hommes en cas d’infarctus du myocarde. « Sauf si un caillot sanguin vient boucher les artères, le cœur des femmes se déchire progressivement au niveau des tissus. La douleur est beaucoup plus discrète, moins soudaine que chez les hommes. »
« Aujourd’hui, il est urgent d’actionner les 3A : alerter, anticiper, agir », continue le Pr Mounier-Vehier. Principaux leviers, prendre conscience des facteurs de risque, des symptômes et enclencher les prises en charge pour réduire les inégalités de suivi entre les sexes. Les femmes exposées aux symptômes doivent appeler leur médecin ou le 15 en cas d’urgence.
Au quotidien, la priorité est « de penser à soi, de se détendre, de s’accorder du temps ». Un point important pour protéger la population féminine alors que « l’infarctus du myocarde est en forte progression chez les femmes jeunes en France avec une augmentation de 5% par an chez les femmes de 45 à 54 ans ».
A noter : chaque année en France, les maladies cardiovasculaires sont à l’origine de 75 000 décès. Ce qui en fait la première cause de mortalité dans la population féminine.
*une consommation de 3 à 4 cigarettes par jour multiplie par 3 le risque d’accident cardiovasculaire
Source : Interview du Pr Claire Mounier-Vehier, chef du service cardiologie au CHU de Lille et co-fondatrice du fonds d’action « Agir pour le cœur des femmes », le 28 mai 2020
Ecrit par : Laura Bourgault - Edité par : Emmanuel Ducreuzet